Olivia Moore estime que sa formation à L’Ecole du one-man-show lui a permis d’affûter ses textes. | Olivia Moore

L’humour s’enseigne-t-il ? A l’heure où de nombreux talents émergent spontanément avec Internet et où, conjointement, se multiplient les écoles qui proposent des formations spécialement consacrées au spectacle comique – Ecole du one-man-show, Atelier de création artistique cabaret (Acac)… –, la question mérite d’être posée. Pour Kader Aoun, ancien comparse de Jamel Debbouze et metteur en scène, la réponse est claire, c’est non : « On ne peut pas apprendre à être drôle. Un boxeur aura beau faire de la musculation toute sa vie, s’il ne possède pas le punch, cela ne sert à rien. Les Anglais emploient d’ailleurs l’expression “funny bones”. L’humour, on l’a dans ses os, ou pas… »

Directeur de l’Ecole du one-man-show, Alexandre Delimoges porte évidemment un point de vue sensiblement différent. Quoique… « Nous n’allons pas apprendre à nos élèves à être drôles, mais à faire rire, nuance-t-il. Nous ne laissons pas croire que tout le monde peut réussir. Le travail est nécessaire et il faut déjà posséder un bagage : avoir de l’humour mais aussi une vision comique, c’est-à-dire être capable de rire de soi et de ce qui nous entoure. »

Une question de rythme

Selon l’humoriste Guillaume Meurice, nul besoin pour cela de fréquenter une école spécifique. « Aux jeunes qui me demandent mon avis, je conseille de passer par une école classique. Au Cours Florent, j’ai travaillé de nombreuses tragédies. Cela m’a servi à installer une certaine rigueur et à asseoir mon point de vue de comédien : pourquoi je joue ce texte-là à ce moment-là ? Qu’ai-je à dire de si important ? » Pour Alexandre Delimoges, la formation qu’il propose permet aux élèves de maîtriser des techniques propres au genre comique : « Ecouter les rires pour modifier le rythme de son texte mais aussi casser le mur pour interpeller le public. »

Passée par l’Ecole du one-man-show, Olivia Moore, actuellement sur les planches de La Nouvelle Seine, à Paris, a justement apprécié la spécificité de la formation : « Etre un bon humoriste implique d’être à la fois un auteur et un comédien. » Au-delà du jeu, on lui apprend à affûter ses textes. Elle réalise ainsi que ce qui coule à l’écrit ne passe pas forcément la barrière de l’oral et polit son spectacle pendant dix-huit mois avant de le jouer dans des salles payantes. Acteur et metteur en scène – notamment du comique Kev Adams –, Serge Hazanavicius voit un autre intérêt à ces écoles : « Evoluer dans un lieu avec des gens qui veulent faire la même chose et des professeurs susceptibles de donner des clés pour y arriver. Cela crée des bandes et des solidarités au cours d’un parcours assez dur. » Comme quoi, apprendre à faire rire apparaît comme une question des plus sérieuses.

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