Bernard Cazeneuve, le 6 décembre. | BERTRAND GUAY / AFP

Conscient de la courte durée de son mandat à la tête du gouvernement, le nouveau premier ministre, Bernard Cazeneuve a évoqué ses priorités, mardi 6 décembre, lors de la passation de pouvoir avec Manuel Valls, à Matignon. « Il reste quelques mois et vous êtes mieux placé que quiconque pour savoir qu’en politique, chaque jour est utile, chaque jour compte », a-t-il déclaré.

« Nous utiliserons par conséquent tous ces jours pour donner de la force à la République, donner de la force à la France, pour lui permettre d’affronter les défis devant elle », a lancé M. Cazeneuve devant M. Valls, qui a remis sa démission à François Hollande mardi matin pour se lancer pleinement dans la primaire organisée par le PS pour la présidentielle. « Il faudra continuer à protéger le pays contre la menace terroriste », une menace « à un niveau extrêmement élevé qui implique que nous continuions à rehausser les moyens des forces de sécurité intérieures et des services de renseignement », après ces « tragédies qu’ont été ces attentats terroristes » ayant marqué sa présence place Beauvau.

« Mais la protection, c’est aussi la protection à laquelle les Français sont attachés, qui est celle de notre modèle social », a dit le nouveau locataire de Matignon, au moment où François Fillon, candidat de la droite à l’élection présidentielle, est accusé de vouloir détruire ce modèle.

« Il n’y a pas d’enfer à Matignon »

M. Valls avait auparavant, dans son discours, répété qu’il était « impossible » de cumuler sa bataille présidentielle avec son poste de premier ministre, et avait salué en M. Cazeneuve un « ami » et même un « frère ». « J’ai mis mon énergie, mon amour de la France, mon engagement auprès des Français au service de ce pays que j’aime par-dessus tout pour le réformer sous l’autorité du président de la République », a insisté M. Valls, évoquant la fin d’une « belle aventure qui a duré trente-deux mois ». « J’ai été un premier ministre heureux. C’est difficile à dire, vu les épreuves traversées. Mais il n’y a pas d’enfer à Matignon, il n’y a que le service de la France », a dit celui qui avait succédé à Jean-Marc Ayrault au printemps 2014.

Avant de se lancer dans la primaire de la gauche, M. Valls a insisté sur son bilan à Matignon, « la politique au service du redressement, la compétitivité, la baisse des impôts pour les couches moyennes et populaires ». « Nous devons l’assumer et, bien évidemment, je l’assume. »

Un fidèle de Hollande à l’intérieur

L’arrivée de M. Cazeneuve à Matignon a obligé le président de la République à un mini-remaniement. Nommé en remplacement de M. Cazeneuve au ministère de l’intérieur, Bruno Le Roux, a déclaré lors de la passation de pouvoir qu’il poursuivra « avec sa sensibilité d’élu » les « actions engagées ». « Pour réussir, il faut de la pondération, de l’humilité » et « le sens de l’Etat », a-t-il indiqué.

Comme M. Cazeneuve, M. Le Roux est un fidèle du chef de l’Etat. Cela faisait des années que l’élu de la Seine-Saint-Denis rêvait d’un poste régalien. Il a été choisi « pour sa compétence, son expérience et sa proximité avec le chef de l’Etat », indique-t-on à l’Elysée. Patron des députés PS depuis le début du quinquennat, son bilan est mitigé. Il n’a jamais réussi à juguler la fronde d’une partie des parlementaires socialistes. De plus la loi travail et la loi Macron ont dû être adoptées via le 49.3. Il n’avait pas fait mystère de son malaise depuis quelques mois, et avait été déçu de ne pas entrer au gouvernement plus tôt.

Cette arrivée est le seul changement notable dans le gouvernement. Tout juste François Hollande intervertit-il deux secrétaires d’Etat, Jean-Marie Le Guen et André Vallini. Le premier prend donc en charge le développement et la francophonie. Et le second, proche de M. Hollande, hérite des relations avec le Parlement. « Avec André Vallini, le premier ministre a souhaité avoir à ses côtés un parlementaire proche et expérimenté », indique-t-on à l’Elysée. Jean-Marie Le Guen, considéré comme un proche de Manuel Valls, était sur la sellette et se voit donc rétrogradé à un poste moins exposé.

Autre fidèle de l’ex-premier ministre, le garde des sceaux, Jean-Jacques Urvoas, reste à la Chancellerie, malgré des relations notoirement difficiles avec M. Cazeneuve.