A Paris, le 5 décembre. | THOMAS SAMSON/AFP

Face à l’épisode aigu et durable de pollution que connaît une large partie de la France, la circulation alternée est reconduite pour la journée du vendredi 9 décembre, à Paris et sa proche banlieue pour la quatrième journée consécutive. Le préfet de la région Auvergne-Alpes s’est également résolu à appliquer cette mesure à Lyon et Villeurbanne.

La circulation alternée, lorsqu’elle est respectée, peut aider à contrer un pic de pollution. Elle comporte cependant d’évidentes limites parce qu’elle ne permet pas de cibler les véhicules les plus polluants. En mars 2014, lorsque le dispositif avait été mis en place et davantage suivi que lors de l’épisode actuel, la concentration de particules fines PM10 (d’un diamètre inférieur à 10 microns) avait diminué en moyenne de 6 % et celle de dioxyde d’azote de 10 %.

A compter du 16 janvier 2017, pour circuler dans Paris, les voitures devront arborer sur leur pare-brise une vignette témoignant de son niveau de pollution, la Crit’air. Avec ces pastilles, les pouvoirs publics pourront agir plus efficacement lors des pics de pollution en ne laissant rouler que les véhicules électriques et de normes Euro récentes.

Samedi 10 décembre, la ministre de l’environnement, Ségolène Royal, pressée d’agir par plusieurs élus, proposera plusieurs mesures en faveur des transports propres au conseil des ministres. Elle souhaite que le bonus pour l’achat d’un véhicule électrique accordé aux particuliers soit étendu aux véhicules utilitaires et que le crédit d’impôt pour l’installation de bornes de recharge électrique pour les particuliers soit augmenté.

Réduire de façon durable la concentration de particules fines – des cancérogènes avérés – dans l’atmosphère appelle toutefois à des mesures plus structurelles. « Les conditions anticycloniques qui provoquent les pics ne viennent qu’accentuer les problèmes de pollution chronique que connaissent les villes », rappelle Karine Léger, directrice de la communication d’AirParif, l’observatoire de la qualité de l’air en Ile-de-France. Dans les agglomérations, le trafic automobile est la principale source de pollution : c’est donc là que les collectivités cherchent en priorité à agir.

  • Instaurer une conduite apaisée en ville

De plus en plus de villes en Europe cherchent à rétablir une conduite apaisée en agglomération, en faisant passer la vitesse autorisée de 50 km/h à 30 km/h. Si cette mesure vise d’abord à améliorer la sécurité et le cadre de vie, elle contribue aussi à réduire la pollution de l’air par une diminution des émissions d’oxydes d’azote et de particules, en incitant à la marche et au vélo pour les déplacements de proximité.

  • Transformer les voies rapides en avenues urbaines

Transformer les voies rapides aménagées en pleine ville durant les Trente Glorieuses fait débat en France, en particulier les voies sur berges à Paris. Mais la question est loin de se limiter à l’Hexagone. New York, San Francisco, Vancouver, Boston, Séoul… plusieurs villes d’Amérique du Nord et de Corée ont opté pour leur suppression. Tous ces projets ont favorisé la renaissance de centres-villes et de quartiers sinistrés par les autoroutes, tout en entraînant une baisse du trafic automobile.

« Au-delà des ajustements de départ, la suppression des voies rapides n’engendre pas de dégradation des conditions de circulation, observe Paul Lecroart, de l’Institut d’aménagement et d’urbanisme d’Ile-de-France, qui a étudié les effets des aménagements réalisés dans une demi-douzaine de grandes villes de la planète. On peut observer des reports de trafic sur les rues adjacentes. Mais même quand le projet ne s’accompagne pas de mesures particulières en faveur d’autres modes de mobilité, on constate une évaporation du trafic. »

Car, explique M. Lecroart, les voies rapides créent un effet d’aubaine. La transformation en avenues amène un certain nombre de personnes à renoncer à leur voiture, elle atténue fortement le bruit et réduit les émissions de CO2 et de particules fines.

  • Interdire les véhicules les plus polluants

Quelque 230 agglomérations européennes ont instauré, depuis près de vingt ans pour certaines, des zones dans laquelle la circulation des véhicules les plus polluants est restreinte, voire interdite. En France, si Paris a été la première ville à mettre en place une telle zone en juillet 2015 – les voitures antérieures à 1997 sont les seules interdites pour l’instant –, Grenoble s’apprête à en créer une le 1er janvier 2017. Et huit autres agglomérations (Strasbourg, Dijon, Bordeaux…) devraient prochainement leur emboîter le pas. La loi de transition énergétique a en effet fini par instituer des zones de circulation restreinte.

Sur la base d’une classification des véhicules en fonction de leurs émissions polluantes, la ville détermine quelle catégorie est autorisée à entrer dans sa zone à faibles émissions. Le contrôle se fait, dans la plupart des cas, par la police grâce à la présence d’une vignette sur le pare-brise. Toute infraction est passible d’une amende. La mise en œuvre est souvent prévue pour être progressive et s’accompagne d’aides aux ménages et de développement des transports propres.

  • Limiter les voitures en centre-ville

Stockholm, Londres, Oslo, Milan, Dublin… plusieurs villes européennes sont allées plus loin encore et ont instauré un péage urbain pour décongestionner leur centre-ville. En rendant l’accès au centre-ville payant pour les voitures, le péage urbain réduit de 15 % à 20 % le trafic automobile.

Le péage urbain s’appuie généralement sur un système de caméras de vidéosurveillance qui vérifie les plaques d’immatriculation des voitures et les compare avec la base de données des personnes ayant réglé leur droit de péage. Ce dernier peut être proportionnel au niveau de pollution du véhicule, comme c’est le cas à Milan (Italie) où l’objectif est aussi de favoriser les comportements vertueux : une voiture qui ne transporte que son conducteur est automatiquement taxée.

  • Des aides pour limiter la pollution due au chauffage

Si, au cœur des agglomérations, le trafic automobile est la principale source de pollution de l’air, le chauffage et notamment le bois peut, à certaines périodes et dans certaines zones, contribuer de façon importante à la pollution de l’air. En Ile-de-France, avec 26 % des émissions, le chauffage (résidentiel et entreprises) est le deuxième secteur qui contribue le plus aux rejets de PM10, après le trafic routier (28 %).

Ce qui amène des collectivités locales à développer des fonds Air-Bois. La Vallée de l’Arve (Haute-Savoie), et plus récemment, Grenoble Métropole, ont mis en place ce dispositif qui permet d’accorder aux ménages utilisant le bois pour se chauffer une prime de 1 000 euros pour le remplacement d’un appareil de chauffage ancien, d’un foyer ouvert (plus polluant) ou d’un vieux poêle par un appareil plus efficace.