Au début des années 1970, il a changé le regard d’une génération sur le théâtre. Il bouscule aujourd’hui la vision paisible que l’on a du travail du verre. Le metteur en scène américain Robert Wilson, également artiste plasticien, présente, cet automne, ses créations à la galerie parisienne Downtown : des vases lourds, tels des boulets translucides, des presse-papiers géants, des urnes antiques ou des météorites…

« Glass Works » : sélection d’œuvres en verre réalisées par Robert Wilson au CIRVA de Marseille, et présentée par la galerie parisienne Downtown. | Marie Clérin - Laffanour Galerie Downtown

C’est Françoise Guichon, la directrice du Centre international de recherche sur le verre et les arts plastiques (Cirva), à Marseille, qui a eu l’idée d’inviter Robert ­Wilson à se confronter à ce matériau millénaire. Le géant s’est ainsi prêté au jeu du feu et du sable de 1994 à 2003, séjournant à Marseille quelques semaines par an.

« Au tout début, j’ai dessiné. Je commence toujours comme ça, avec mes pastels de couleur. » Robert Wilson

« J’ai passé neuf ans sur ce projet verre, soit plus de temps qu’à monter une pièce de théâtre qui m’accapare trois ou quatre ans ! », s’amuse Robert Wilson, lui-même collectionneur de verrerie (dont les sculptures de l’artiste contemporaine Laura de Santillana, la petite-fille de Paolo Venini, le fondateur de la manufacture vénitienne). « Au tout début, j’ai dessiné. Je commence toujours comme ça, avec mes pastels de couleur, que ce soit pour un opéra ou une œuvre plasticienne », précise-t-il. « Le premier objet que j’ai imaginé était très sombre, presque noir, sans transparence aucune. Ce fut un choc pour Lino Tagliapietra, maître verrier venu de Murano, avec qui je collaborais : c’était à l’opposé de son travail. »

Lumière intériorisée

Après plusieurs recherches, Robert Wilson a abandonné ses crayons et demandé au souffleur d’enrouler un large ruban de verre autour d’un cylindre creux, de l’écraser, afin de le faire entrer dans un plus gros cylindre. Vases en verre soufflé ou pièces au sol faites de verre coulé, aux couleurs subtiles, à la surface lisse, satinée à la main ou rugueuse, car portant l’empreinte du sable… Ainsi est née cette collection où la lumière semble prisonnière de l’objet, presque intériorisée, évoquant tantôt la neige, l’eau, le quartz.

« La lumière définit l’espace, souligne ­Robert Wilson. Einstein disait que l’obscurité n’existe pas : c’est simplement l’absence de lumière. » Françoise Guichon voit au cœur de ses pièces de verre les éclairages de ses spectacles tels qu’ils « sont entrés dans notre imaginaire : les lumières dorées de I La Galigo, celles bleutées de The Black Rider, grises de A Dream Play, légèrement mauve de Lulu ». Comme le résumé d’une obsession wilsonienne : « L’importance que Bob Wilson accorde à l’éclairage de ses mises en scène et qui l’a conduit à des innovations sublimes… »

Galerie Downtown, 18, rue de Seine, Paris 6e. Tél. : 01-46-33-82-41. www.galeriedowntown.com

« Faust I & II » : le pacte avec le diable de Robert Wilson