Benoît Hamon sur le plateau de « L’émission politique » sur France 2, jeudi 8 décembre. | FRANCOIS GUILLOT / AFP

On le présente souvent dans l’ombre d’Arnaud Montebourg avec qui il avait été sorti du gouvernement en août 2014. Benoît Hamon, candidat à la primaire de la gauche, a affirmé ses différences, jeudi 8 décembre, en déroulant ses propositions sur le plateau de « L’émission politique » sur France 2. Temps de travail, éducation, cannabis, revenu universel… Voilà ce que l’on peut retenir de son intervention.

  • Qui doit être candidat à la primaire ?

Pour Benoît Hamon, le renoncement de François Hollande à briguer sa propre succession va permettre aux candidats à la primaire de la gauche de « dire quelle est l’idée que nous nous faisons de la gauche » en dehors de la personnalité du président de la République espère-t-il. Comme Jean-Christophe Cambadélis et plusieurs personnalités à gauche, M. Hamon souhaiterait voir Jean-Luc Mélenchon et Emmanuel Macron participer à cette primaire, ce qu’ils refusent pour le moment. « Si vous pensez pouvoir rassembler la gauche venez aux primaires », leur a-t-il lancé, ajoutant :

« Moi je redoute que Jean-Luc Mélenchon veuille faire perdre le PS et pas gagner la gauche. »

Si par ailleurs il « assume les passerelles » avec le programme du fondateur du parti de gauche, la différence, selon lui, tient au rapport à l’Europe. M Hamon ne croit pas qu’il faille établir « un rapport de force » avec Bruxelles et les partenaires européens, contrairement à MM. Montebourg et Mélenchon. « Le protectionnisme s’exerce aux frontières de l’Europe » et non pas à l’intérieur en menaçant de « reprendre ses libertés », a-t-il précisé.

  • « J’accepte les règles de la primaire »

Interrogé sur le fait de savoir s’il soutiendra Manuel Valls dans l’hypothèse où l’ancien premier ministre remporterait la primaire de la gauche, Benoît Hamon a assuré qu’il le ferait sans ciller. « Quand on est candidat, on accepte les règles », a-t-il martelé. « Il y a des différences de propositions très importantes avec Manuel Valls », a concédé M. Hamon mais « pas de gauches irréconciliables » contrairement à ce qu’avait déclaré en février son ancien collègue au gouvernement.

  • En finir avec le « mythe » de la croissance

M. Hamon se distingue par un programme où il plaide « l’abandon » du « mythe » de la croissance. « La croissance du produit intérieur brut, c’est une convention, mais la richesse économique ça ne dit pas le bonheur, le niveau de développement, d’inégalités… », a-t-il expliqué.

« La course à la consommation nous mène à la catastrophe, la productivité nous mène à la catastrophe », assure encore le député des Yvelines qui estime que les efforts faits pour privilégier la croissance pendant le quinquennat écoulé n’ont pas eu d’effet sur celle-ci.

  • « On me prête de vouloir faire les 32 heures »

Benoît Hamon s’est défendu d’avoir jamais proposé d’abaisser la durée légale du travail. « Depuis que je suis entré en campagne, on me prête de vouloir faire les 32 heures », a-t-il déclaré, expliquant qu’il n’entendait pas revenir sur les 35 heures mais « encourager le temps partiel ». « Il faut accompagner les transitions », a plaidé M. Hamon, assurant que tous les emplois détruits par la robotisation ne seront pas recréés. Pour lui, ces transitions « vont amener les hommes et les femmes à travailler moins ».

  • Revenu universel et son financement

Autre volet notable de son programme, qui va de pair avec la diminution du temps de travail : la mise en place d’un revenu universel d’existence d’un montant de 535 euros par mois. Une mesure qui coûterait 300 milliards d’euros par an. Interrogé sur son financement, M. Hamon a estimé qu’il fallait d’abord voir le « sens » de ce qui constitue « une nouvelle Sécurité sociale ».

Ce revenu universel comprendra l’ensemble des minimas sociaux, les allocations logement et familiales et sera financé a-t-il dit de plusieurs manières, à travers une réforme fiscale – qui « épargnera les classes moyennes et populaires » –, en luttant contre l’évasion fiscale et en prélevant des « cotisations sociales sur le travail des robots » lorsqu’ils remplacent celui d’un être humain.

  • Etendre aux lycées la réforme de l’éducation prioritaire

Après avoir défendu le bilan du quinquennat dans l’éducation nationale, celui qui a détenu ce portefeuille pendant quatre mois a dit son intention, s’il est élu, d’étendre la réforme de l’éducation prioritaire aux lycées. Cette réforme, mise en œuvre sur l’ensemble du territoire à la rentrée 2015, se limitait jusque-là aux écoles et collèges, prévoyant notamment du soutien pour les sixièmes, du temps pour le travail commun des professeurs et des primes rehaussées.

« S’il est un domaine où il faut continuer à investir c’est celui de l’éducation nationale », a insisté M. Hamon. Il propose pour cela le recrutement de 20 000 enseignants pour mettre en place des cycles de formation continue pour les enseignants, mais aussi 20 000 autres postes pour « continuer à donner la priorité à l’école primaire ».

« Il faut se fixer un objectif pour que, sur le cycle 2 [CP au CE2], il n’y ait pas plus de 20 élèves par classe en moyenne. »
  • Légaliser du cannabis

C’est l’une des mesures phare de son programme. Interrogé sur sa proposition de légaliser le cannabis et non pas, comme nombre d’autres politiques, d’en dépénaliser l’usage, M. Hamon a expliqué qu’il souhaitait « consacrer l’argent mobilisé sur la répression à la prévention » de la consommation afin de lutter contre ce qui constitue « la principale économie de la drogue en France ».

  • Environnement : « ce qui me choque c’est la remise en cause du principe de précaution »

Questionné sur les risques des perturbateurs endocriniens, M. Hamon s’est est pris aux « industriels » qui « fabriquent du doute au mépris de la santé des familles ». Pour le candidat à la primaire, « dès qu’il existe un soupçon de dangerosité pour la santé des Français », il faut faire valoir « un principe de précaution ».

L’ancien ministre s’en est à cette occasion pris au programme de François Fillon qui entend remettre en cause ce principe inscrit dans la Constitution. « Cela nous indique qu’il ne fera pas une politique pour protéger la santé des Français mais protectrice des intérêts privés », l’a-t-il accusé.