Le 5 mars, le mage Nikolaus Harnoncourt tirait sa révérence. Charisme, puissance, ferveur, autorité – ceux qui l’ont vu diriger s’en souviendront toute leur vie –, le chef autrichien a tracé dans l’histoire de l’interprétation une ligne de démarcation, un avant et un après, dont témoigne ce coffret en forme de viatique édité par Warner Classics.

Scrutateur des rapports dia­lectiques entre partitions et his­toricité, l’homme a toujours combattu les conservatismes, s’érigeant contre celui de la Vienne musicale dont il était issu, querellant l’intransigeance de collègues baroqueux, gardiens d’un temple idéologue. C’est en homme libre qu’il a renouvelé en profondeur l’écoute de toute une génération (et donc des suivantes).

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Battue solaire

Il suffit de réentendre cet Orfeo de 1968 dru et sanguin, le Vivaldi des Quatre saisons dont tant ont fait, à sa suite, leur fagot, sans oublier Bach (l’encre noire de la cantate Ich habe genug), le Mendelssohn feu follet du Songe d’une nuit d’été, et Schumann, dont la ­Quatrième symphonie prend sous cette battue solaire des allures ­démoniaques, tandis que le violon de Gidon Kremer rend au Concerto schumannien ses lettres de folie et de noblesse. Le soprano d’Edita Gruberova au sommet dans Mozart, une Septième de Bruckner par des Wiener Philharmoniker sortis de leurs glorieux sentiers battus, avec pour couronnement un bouquet de valses viennoises tournoyant entre ciel et terre. Indispensable.

The Art of Nikolaus Harnoncourt. Bach. Beethoven. Biber. Bruckner. Dvorak. Haendel. Haydn. Mendelssohn. Monteverdi. Mozart. Schubert. Schumann. Johann Strauss. Vivaldi. 15 CD Warner Classics.

40 euros.