Bernard Cazeneuve le 6 décembre à Paris. | THOMAS SAMSON / AFP

Bernard Cazeneuve, promis au bail de Matignon le plus court de la VRépublique, prononce, mardi 13 décembre, sa déclaration de politique générale à l’Assemblée nationale. Le nouveau premier ministre est soucieux de convaincre qu’il n’est pas là pour « éteindre la lumière » d’un quinquennat Hollande menacé d’étiolement.

Une semaine après la passation de pouvoirs avec Manuel Valls, le chef du gouvernement est attendu à la tribune à 15 heures pour un discours d’une demi-heure à une heure, suivi d’un débat et d’un vote.

Plus tard dans la soirée, après le – très probable – vote de confiance, l’ancien ministre de l’intérieur se soumettra, toujours dans le même hémicycle, au premier vrai round de son poste de premier ministre, avec le débat puis le vote de la prolongation, jusqu’au 15 juillet 2017, de l’état d’urgence.

Aucune obligation constitutionnelle

A 130 jours du premier tour de la présidentielle et à deux mois et demi de la fin de la session parlementaire, il aurait pu renoncer à engager la responsabilité de son gouvernement, une tradition républicaine sans aucune obligation constitutionnelle.

Mais cela aurait alimenté les critiques de l’opposition, qui moque déjà un premier ministre nommé pour « fermer les lumières » après la renonciation de François Hollande à être candidat à sa succession, selon la formule du patron des députés Les Républicains (LR), Christian Jacob.

Lors de la passation à Matignon, mardi 6, M. Cazeneuve avait déjà essayé d’effacer cette image, lui qui va battre le record d’Edith Cresson, restée dix mois à Matignon. « Chaque jour est utile, chaque jour compte », avait-il lancé dans la cour pavée de la rue de Varenne.

« Comme on passe son temps à m’expliquer que je n’ai que cinq mois devant moi, je m’emploie à tout faire dans les mois qui viennent. Ce qui veut dire de faire en sorte que chaque jour compte triple. Ainsi, à la fin, cela me donnera la longévité moyenne d’un premier ministre sous la Ve République », s’est-il amusé, lundi, lors d’un déplacement en Ariège.

« Protection »

Le troisième premier ministre de François Hollande a placé son action sous le mot d’ordre de la « protection » : protection et sécurité des Français en période de forte alerte terroriste, mais aussi protection sociale, alors que la gauche donne de la voix contre la « purge » du candidat de la droite, François Fillon.

Autre objectif, selon son entourage : « mener à son terme l’action de redressement engagée par ses prédécesseurs », en finalisant quelques dossiers (investissements d’avenir, compte pénibilité…) et en prenant les cruciaux décrets d’application des lois du quinquennat.

Pas un discours d’annonces, selon Matignon, mais M. Cazeneuve entend aussi « préparer l’avenir » : il devrait notamment revenir sur la « transition énergétique » après le pic de pollution qui a encrassé les poumons de nombreux Français ces derniers jours.

« Exécuteur testamentaire »

Si l’enjeu reste limité, le vote vaudra aussi pour sa valeur de test pour la majorité. Fidèle appui du chef de l’Etat, M. Cazeneuve crispe moins l’aile gauche de la majorité que M. Valls, qui avait dû batailler avec les « frondeurs » du Parti socialiste (PS).

« C’est quelqu’un de très respectueux des différentes sensibilités dans l’hémicycle, y compris de celle du Front de gauche », juge ainsi le député communiste (PCF) du Puy-de-Dôme André Chassaigne, même si, ajoute-t-il, le premier ministre « ne sera que l’exécuteur testamentaire de la politique de François Hollande et Manuel Valls ».

Ce dernier s’était soumis à deux déclarations de politique générale : l’une début avril 2014 après sa nomination, une autre en septembre de la même année, après la démission du gouvernement provoquée par l’éviction d’Arnaud Montebourg (économie) et de Benoît Hamon (éducation nationale).

Au premier vote, M. Valls avait réuni 306 voix pour lui (239 contre, 29 abstentions). Au second, son soutien avait fondu à 269 voix (244 contre, 53 abstentions), bien en dessous du seuil des 289 de la majorité absolue. Les « frondeurs » discuteront d’une position collective de vote mardi matin, a indiqué le député socialiste de la Nièvre Christian Paul.

Mercredi, Bernard Cazeneuve répétera en personne l’exercice au Sénat.