Sur une chaîne de production de la Peugeot 5008 le 24 novembre 2009 à Sochaux-Montbéliard. | SEBASTIEN BOZON / AFP

Réunie une nouvelle fois jeudi 15 décembre, la commission Royal sur les émissions polluantes des diesels a pris connaissance des résultats de nouveaux tests menés sur trois véhicules. Après la remise fin juillet de son rapport qui avait révélé « de nombreux dépassements » des seuils de pollution sur 86 véhicules, il avait été décidé que le Top 10 des mauvais élèves serait à nouveau passé au crible par l’Institut français du pétrole Energies nouvelles (IFPEN) pour mettre en évidence la possible présence de logiciels truqueurs.

Les membres de la commission se sont ainsi vu présenter jeudi les résultats des tests menés sur trois voitures de norme Euro 5 : une Peugeot 5008 – la seule du constructeur ayant émis lors des premiers contrôles par l’UTAC-Ceram des oxydes d’azote (NOx) en quantité anormale – ; et deux Volkswagen, une Audi A1 et une Polo.

Le groupe PSA peut souffler : son modèle Peugeot 5008 a passé ces nouveaux tests. « Elle n’émet pas davantage de NOx lorsqu’elle est testée via un protocole légèrement modifié », a expliqué Gaëtan Monnier de l’IFPEN. Le monospace émet, il est vrai, à haute vitesse (100 km/h) 2,6 fois plus de NOx que la norme Euro 5 mais tout en restant proche de son seuil maximum (186 mg/km contre 180 mg/km autorisés). « On reste dans l’esprit de la norme. A haute vitesse, c’est tout le réglage du moteur qui change, pas uniquement le système de dépollution, a précisé Gaëtan Monnier. Cela correspond à un choix du constructeur de privilégier la réduction des émissions de CO2 à celles de NOX lorsque le moteur est chaud. » Lors de son audition devant la commission, le groupe PSA avait déjà défendu cette position.

Logiciel truqueur

En revanche, les tests de l’IFPEN ont confirmé que les deux Volkswagen étaient équipées d’un logiciel truqueur, qui détecte le cycle et règle en conséquence les vannes EGR (recirculation des gaz d’échappement) devant éliminer les NOx. Résultat : l’Audi A1 émet en moyenne 4 fois plus de NOx que la norme autorisée, et même jusqu’à 10 fois plus à vive allure (100 km/h).

La petite Polo, quant à elle, double ses émissions de NOx même si elle reste sous le seuil de la norme. Ce qui a d’ailleurs amené les membres de la Commission à se demander quel était l’intérêt de l’avoir équipée d’un logiciel truqueur.

Le ministère a, sur ces faits, demandé à Volkswagen une note expliquant le fonctionnement des systèmes de dépollution de ces deux modèles. Il avait fait de même avec Fiat et Renault, dont respectivement un et deux véhicules ont été précédemment testés par l’IFPEN et ont présenté de nets dépassements des seuils de NOx. Si le groupe français a répondu, l’italien a fait jusqu’ici la sourde oreille aux demandes d’explications quand bien même son modèle 500X émet des NOx jusqu’à dix fois supérieurs à la norme.

La commission a demandé à l’IFPEN de tester trois autres mauvais élèves diesel : une Mercedes Classe S, un Ford Kuga et une berline Opel Astra. Et elle a réitéré son souhait de voir l’Institut national de recherche en informatique et en automatique établir un protocole pour pouvoir inspecter en profondeur les logiciels de moteur, ce qui n’a pas été possible jusque-là.

Commission permanente de surveillance du marché

Lors de cette réunion, la commission Royal s’est aussi interrogée sur son devenir. Une fois ces nouveaux tests achevés en février 2017, doit-elle considérer sa mission comme terminée ? L’idée de se transformer en une commission permanente de surveillance du marché a été soulevée. Son rôle pourrait ainsi consister à instaurer un contrôle, a posteriori et aléatoire, des véhicules en circulation.

Certains membres de la commission se sont interrogés sur la suite à donner à ces contrôles. « Le fait même que les tests menés par la commission puissent susciter une enquête de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) est important », a insisté Lorelei Limousin, du Réseau action climat, l’une des deux ONG membres de la commission. La DGCCRF s’est de fait saisie du dossier de plusieurs constructeurs, dont celui de Renault qu’elle a transmis au parquet de Nanterre le 9 novembre.

Si la DGCCRF découvre une fraude sur un modèle homologué ailleurs qu’en France, le gouvernement n’a cependant aucun moyen de contraindre à l’action un autre Etat. « Nous avons la main sur PSA et Renault, mais pas sur les constructeurs homologués par les autres Etats membres de l’Union européenne », n’a pas caché le représentant du ministère de l’environnement. Malgré cette limite, « maintenir une pression sur le marché peut être utile », a affirmé celui-ci, tout en proposant aux membres de la commission de réfléchir à cette hypothèse d’ici la prochaine réunion fin février 2017.