Et ainsi, en moins de temps qu’il n’en faut pour l’écrire, ou presque, le nombre de métropoles en France est passé de quinze à vingt-deux. Sept nouvelles agglomérations – Dijon, Orléans, Saint-Etienne, Toulon, auxquelles se sont ajoutées Clermont-Ferrand, Metz et Tours – ont gagné jeudi 15 décembre, lors de l’examen à l’Assemblée nationale du projet de loi sur la statut de Paris et l’aménagement métropolitain, leurs galons de métropole.

Leurs représentants – les élus des communes concernées étaient bien présents en séance – n’ont pas eu à faire le forcing. Pourtant, il n’y a guère, le ministre des collectivités territoriales, Jean-Michel Baylet, ne cachait pas ses réserves quant à la multiplication des métropoles, souhaitant que leur nombre reste limité à quinze. « Nous avons déjà plus de communes que l’Europe réunie, on va finir par avoir plus de métropoles que le monde entier. Ça finit par ne plus avoir aucun sens », déplorait-il dans ces colonnes (Le Monde du 12 août). C’était après que le conseil des ministres avait accepté d’intégrer dans ce projet de loi un article assouplissant les critères d’accession au statut de métropole, créé par la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles (Maptam) du 27 janvier 2014.

Jeudi, dans l’Hémicycle, le ministre a succombé sans combattre à l’offensive des partisans de l’extension, défendant la cause de leurs villes d’élection, où ils ont aussi, souvent, des mandats locaux, droite et gauche confondues. Que ce soit Olivier Carré (LR, Loiret), maire d’Orléans, ou Valérie Corre (PS, Loiret), ancienne conseillère municipale de la même ville. Ou Philippe Briand (LR, Indre-et-Loire), maire de Saint-Cyr-sur-Loire et président de la communauté d’agglomération de Tours, ou Jean-Patrick Gille (PS, Indre-et-Loire), ancien premier adjoint au maire de Tours.

Visibilité, attractivité et influence

« Nous n’appartenons pas à la même famille politique mais nous sommes ensemble, unis, comme tout un département, toute une agglomération pour soutenir ce projet. On a réussi à fédérer toutes les énergies », a résumé M. Briand. M. Baylet n’a pu résister à ce grand numéro de duettistes. « J’étais hostile à l’augmentation du nombre de métropoles, a-t-il convenu. Mais voir des parlementaires, de droite et de gauche, la main dans la main, venir plaider avec talent, avec conviction, avec flamme, le dossier de leur territoire m’a fait changer d’avis. Vous m’avez fait prendre conscience qu’il fallait, si nous voulions aménager harmonieusement le territoire, avoir un maillage convenable des métropoles. »

En réalité, la messe était dite bien avant que ne débute la séance. Depuis des mois, les élus des villes aspirant à devenir métropoles font le siège des lieux de pouvoir. A plusieurs reprises, ils ont été reçus par le président de la République, le premier ministre ou le ministre des collectivités territoriales. La constitution des grandes régions a renforcé les craintes de certaines d’entre elles de perdre en visibilité, en attractivité et en influence.

Alors François Hollande a passé de la pommade sur les irritations des uns et des autres. Toulon souffrait d’être pris en étau entre Marseille et Nice : la voilà métropole à son tour. La région Auvergne-Rhône-Alpes en avait déjà deux, avec Lyon et Grenoble, elle en aura deux de plus : Clermont-Ferrand et Saint-Etienne. Le Centre-Val-de-Loire en était dépourvu : Orléans a décroché la queue du Mickey, suscitant immédiatement la jalousie de la voisine Tours qui, à son tour, a été satisfaite. Enfin, Metz, déjà éclipsée par Strasbourg, la capitale du Grand Est, ne pouvait tolérer que sa voisine et rivale Nancy ait accédé au Graal : la voilà consolée.

Pratiquement un quart des départements métropolitains sont à présent dotés de métropoles. Et il se pourrait bien que la liste s’allonge. Déjà Amiens et Limoges frappent à la porte.