La situation dans le bassin du Lac Tchad, où la conjonction d’un conflit armé et d’une crise écologique ont poussé au bord de la famine près de 8 millions de personnes, est « la plus négligée en 2016 » selon un sondage mené par la fondation Thomson Reuters auprès de 19 organismes d’aide humanitaire.

La crise dans cette région du Sahel reçoit encore moins d’attention que les crises graves au Yémen ou au Soudan du Sud, où le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-Moon, a récemment dit craindre un génocide imminent. Eclipsé par les guerres en Syrie et en Irak et la crise mondiale des réfugiés et des migrants, le lac Tchad a rarement fait la une des journaux cette année, mais les organismes d’aide humanitaire affirment que la crise a pris une « très grande ampleur », avec « des niveaux terrifiants de sous-nutrition infantile ».

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« La Syrie m’a brisé le cœur, mais avec des souffrances humaines extrêmes et presque aucune couverture médiatique, la crise alimentaire provoquée par Boko Haram au Nigeria et au Niger a été la pire de son genre », a déclaré Suzanna Tkalec, directrice humanitaire de Caritas.

Au total, les combattants de Boko Haram ont causé le déplacement de 2,4 millions de personnes au Nigeria, au Cameroun, au Tchad et au Niger au cours d’un conflit de sept ans visant à créer un califat islamiste. Depuis 2009, le mouvement terroriste a causé la mort d’au moins 20 000 personnes dans la région.

Oxfam rappelle que certaines régions du nord du Nigeria souffrent déjà de la famine, ce que confirme Action Contre la Faim. Au total, près de 7 millions de personnes manquent de nourriture mais l’insécurité complique la tâche des organismes d’aide pour atteindre les plus vulnérables.

Manques de nourriture et de soins

Le directeur des programmes d’International Medical Corps, Ognjen Radosavljevic, a déclaré que les fermetures des frontières avaient perturbé les marchés, que l’agriculture s’effondrait et que la nourriture était devenue hors de prix. « Il est essentiel que la communauté internationale se réveille face aux atrocités dans la région », a-t-il ajouté.

En plus de la faim, les populations déplacées manquent aussi d’accès aux soins, un fléau pour ceux qui souffrent du VIH et d’autres maladies ou pour les femmes qui ne peuvent accoucher dans de bonnes conditions.

Depuis un an, le repli de Boko Haram autour de cette zone exacerbe les violences et a provoqué la mort ou le départ de milliers d’habitants des ports ou des îles habitées. En proie à l’assèchement depuis les années 1960, la superficie du lac a par ailleurs été divisée par dix depuis, mais celui-ci demeure malgré tout l’un des plus grands d’Afrique.