Science-fiction, poésie et musique noire : la diversité est aux commandes pour cette dernière sélection de l’année.

SCIENCE-FICTION « Scintillements », d’Ayerdhal

Disparu en 2015, Ayerdhal, de son vrai nom Marc Soulier, fut l’un des artisans les plus flamboyants du renouveau de la science-fiction française des années 1990. Voici en un seul volume l’intégralité des nouvelles qu’il a confiées à des revues ou à des anthologies. Les unes s’étirent sur une cinquantaine de pages, d’autres tiennent en quelques feuillets. Space opera, récit d’anticipation politique, fable écologique… Tous les textes permettent de saisir la cohérence d’un parcours littéraire croisant habilement les genres (thriller, fantastique, policier), ainsi que de découvrir la permanence des préoccupations d’Ayerdhal. Ainsi, son engagement progressiste, déjà tout entier contenu dans son premier roman, La Bohème et l’Ivraie (1990). La nouvelle la plus émouvante, Scintillements, donne son titre au recueil. Elle conte la mission d’un savant xénologue, dépêché dans le système de Trence pour découvrir les raisons d’un étrange carnage. Pourquoi un million de Batiks, un peuple très avancé et mal connu, a-t-il préféré le suicide collectif à la poursuite d’une guerre contre les humains vieille de six siècles ? Macha Séry

Au diable vauvert

Scintillements. Intégrale des nouvelles d’Ayerdhal, Au diable vauvert, 708 p., 23 €.

CHRONIQUES « La Conscience », d’Hubert Lucot

Les fins d’année sont propices aux rétrospectives et autres gymnastiques mnésiques. En littérature, le temps d’imprimer, elles prennent un peu de retard. Le nouveau volume autobiographique du poète Hubert Lucot nous permet donc de revisiter (entre autres) les années 2013-2015 plutôt que la dernière : cela change un peu – et aide à relativiser. Dans une vidéo diffusée sur le site de l’éditeur POL, l’écrivain, âgé de 81 ans, filmé couché, décrit La Conscience comme le quatrième moment d’un cycle intitulé « Le Cancer et la Mort », commencé avec le décès de sa femme, « A. M. », en 2010. La mort, explique-t-il, est une « force théorique » – et « toute théorie donne des sensations ». Hubert Lucot ne se sépare jamais d’un cahier dans lequel il consigne au jour le jour la matière de la vie : titres aperçus dans les journaux, choses vues et entendues, mais aussi les souvenirs qui viennent s’y accrocher ou remontent spontanément, faisant de chaque instant de perception une mouvante constellation. Eric Loret

La Conscience, d’Hubert Lucot, POL, 410 p., 22 €.

BEAU LIVRE « Black Music », de Christian Eudeline

Depuis plusieurs années, l’édition de livres consacrés à la musique propose des ouvrages qui s’appuient sur un modèle éprouvé, prendre un genre et identifier les albums de référence qui y sont liés. Avec Black Music, Christian Eudeline se tient en un juste équilibre entre objectivité (les évidences telles Knock on Wood, d’Eddie Floyd, Hot Buttered Soul, d’Isaac Hayes, What’s Going On, de Marvin Gaye…) et subjectivité, en sacralisant dans cette liste quelques réputations plus spécialisées (Don Covay, le trio Detroit Emeralds, Mandrill…). L’auteur justifie toujours ses choix par un texte précis, qui mêle informations sur une carrière, le disque en particulier et des anecdotes. Les dimensions et le format carré du livre permettent, en regard, une reproduction quasi à l’identique des pochettes des 33-tours. Sylvain Siclier

Gründ

Black Music. De la soul au R’n’B. Les 100 albums cultes, de Christian Eudeline, Gründ, 216 p., 24,95 €.