Une cinquantaine d’associations luttant contre la pauvreté (ATD Quart Monde, le Secours catholique, la Croix-Rouge française, Emmaüs…), venant en aide à quelque 4 millions de personnes, lancent mercredi 4 janvier une campagne pour démonter ce qu’elles considèrent comme des préjugés à l’égard des plus démunis.

Il s’agit d’« affronter directement les candidats qui les relaient », a expliqué Christophe Robert, délégué général de la Fondation Abbé Pierre, lors d’une conférence de presse dans un centre d’hébergement parisien. « C’est un exercice un peu nouveau pour nous », mais « les associations en ont assez d’êtres sages. On ne peut pas subir un tel décalage entre la réalité de ce que vivent les personnes (…) et les discours politiques. »

Parmi les propos polémiques relayés par les politiques, M. Robert cite ceux du conseil départemental du Haut-Rhin et de son président (Les Républicains) Eric Straumann, qui souhaitent conditionner le revenu de solidarité active (RSA) à du bénévolat, ou encore ceux de l’ancien premier ministre et actuel candidat à la primaire socialiste Manuel Valls, qui a déclaré que les Roms ont « des modes de vie extrêmement différents des nôtres, qui évidemment sont en confrontation ».

Signaler « les contrevérités et l’instrumentalisation »

« Mieux vaut être migrant que sans-abri français » (pour bénéficier d’aides), « les étrangers volent le travail des Français », « les allocations chômage n’incitent pas à la reprise de l’emploi », « la protection sociale coûte beaucoup trop cher et ne sert à rien » : autant de phrases que les associations comptent démonter. La campagne, qui débutera réellement à la fin de janvier, se fera aussi sur Internet, avec la mise en place d’un site démontant les idées fausses, ou grâce à des plates-formes rassemblant les propositions des associations, et des visuels relayés sur les réseaux sociaux.

« Nous dénoncerons les contrevérités et l’instrumentalisation de la misère humaine à des fins politiciennes, a ajouté Florent Gueguen, directeur général de la Fédération des acteurs de la solidarité (Fnars). Notre objectif, in fine, c’est que cette campagne présidentielle n’oublie pas les 9 millions de personnes qui vivent aujourd’hui en dessous du seuil de pauvreté, qui sont très largement exclues du débat politique, exclues des propositions et des priorités des principaux candidats à l’élection. »

Car, pour l’instant, s’« il y a des visites [de candidats à la présidentielle] dans les centres d’hébergement », comme François Fillon mardi dans un centre Emmaüs, « il n’en sort pas grand-chose », a déploré M. Gueguen. Le président d’Emmaüs France a d’ailleurs demandé mardi au candidat des Républicains « une évolution de son programme en partie sur la question du logement, du service public, sur la question du partage du travail et des richesses ».

Selon l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), le taux de pauvreté, c’est-à-dire la proportion de personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté monétaire (60 % du niveau de vie médian) de 1 008 euros par mois, a progressé de 0,2 point en 2015, à 14,3 %.