L’« Oasis 4 », lors de sa construction sur les chantiers de Saint-Nazaire, en octobre 2016. | Loïc Venance / AFP

Le maire socialiste de Saint-Nazaire (Loire-Atlantique) David Samzun apprécie peu la décision du tribunal de commerce du district central de Séoul qui a désigné, mardi 3 janvier, le groupe italien Fincantieri comme candidat privilégié pour reprendre les chantiers navals de la ville. Ceux-ci appartenaient jusqu’à présent au conglomérat sud-coréen STX.

L’élu doit rencontrer le secrétaire d’Etat chargé de l’industrie Christophe Sirugue à l’occasion de sa venue sur les chantiers navals de Saint-Nazaire mercredi. Pour M. Samzun, l’Etat doit garantir « la pérennité de ce fleuron industriel ». « L’Etat français peut bloquer cette proposition, peut construire une proposition complémentaire, il est encore temps de la travailler, a-t-il dit sur France Bleu Loire Océan. Je verrais d’un mauvais œil que Fincantieri soit majoritaire, et soit donc le patron de nos chantiers. »

« Aujourd’hui, on a une visibilité à dix ans. Mais si le marché se resserre, les chantiers ne risquent-ils pas de devenir la variable d’ajustement ? Autre danger, le transfert du savoir-faire de Saint-Nazaire vers la Chine, où Fincantieri possède une filiale », déclare M. Samzun dans Ouest-France.

« Airbus des paquebots »

Le tribunal de Séoul avait peu de choix quant à la reprise des chantiers navals de Saint-Nazaire. L’italien Fincantieri est le seul à avoir déposé une offre en bonne et due forme. Les dirigeants italiens entendent constituer ainsi un champion européen, un « Airbus des paquebots » puissant sur le plan économique mais doté aussi de fortes connexions politiques : tandis que l’Etat italien est l’actionnaire de contrôle de Fincantieri, l’Etat français gardera ses 33 % dans la structure française.

Mais l’affaire n’est pas encore bouclée pour autant. D’une part, la puissance du nouvel ensemble pourrait inciter certains clients, ou des rivaux comme l’allemand Meyer Werft, à saisir les autorités chargées du respect de la concurrence afin d’empêcher la constitution d’un duopole en Europe. D’autre part, l’Etat français n’a pas dit son dernier mot. Politiquement, il ne peut guère bloquer la vente de Saint-Nazaire à un industriel européen de renom. Mais le gouvernement souhaiterait un élargissement du tour de table de la filiale française au constructeur naval militaire DCNS, qu’il contrôle. Cela renforcerait le poids de l’Etat et limiterait l’influence de Fincantieri.

En cent cinquante-cinq ans, plus de 120 paquebots sont sortis de Saint-Nazaire, dont le Normandie, le France et, en 2016, le Harmony-of-the-Seas, le plus grand bateau de croisière jamais conçu.