Arnaud Montebourg, le 4 janvier, à Paris. | JACQUES DEMARTHON / AFP

On pourrait appeler cela « le pari de Montebourg ». L’ancien ministre du redressement productif est persuadé que la primaire à gauche mais aussi l’élection présidentielle se joueront sur l’économie et l’emploi, et non sur les questions de sécurité ou d’identité. Une position qui le distingue de Manuel Valls, plus en pointe sur les sujets régaliens, ou de Benoît Hamon, dont le programme est davantage axé sur les questions de société.

« Je suis le candidat du travail et de la fiche de paie », a martelé Arnaud Montebourg, mercredi 4 janvier, lors d’une présentation à la presse de son « manifeste économique ». « Je revendique toute l’histoire de la gauche en faisant de la transformation de l’économie du pays le cœur de mon projet », explique-t-il dans ce document de 25 pages, où il dit s’inspirer aussi bien de Pierre Mendès France que de Michel Rocard ou… du général de Gaulle.

Désireux de « rompre avec l’austérité » pratiquée selon lui depuis 2012, l’ex-avocat compte relancer l’économie en augmentant les dépenses publiques d’un peu plus de 24 milliards d’euros par an sur la durée du quinquennat. « Mon projet est keynésien », assume le trublion de Saône-et-Loire, pour qui « l’effet multiplicateur » de ces dépenses sur la croissance doit permettre d’éviter un dérapage des finances publiques. « Un cycle mondial de relance keynésienne est en train de se lever : dix pays du G20 ont pris ce chemin », justifie-t-il.

Concrètement, le candidat s’engage, s’il est élu, à investir 4 milliards d’euros par an dans « les infrastructures », plus 4 autres milliards dans « la rénovation thermique des logements ». Pour doper le pouvoir d’achat des Français, il préconise une « baisse massive de la CSG sur les petits salaires » jusqu’à 1,4 smic, pour un coût estimé à 8 milliards d’euros par an. Une position orthogonale à celle d’Emmanuel Macron, qui prône au contraire une hausse de 1,7 point de la CSG. Par le passé, une telle mesure a déja été censurée par le Conseil constitutionnel, mais les conseillers de M. Montebourg assurent avoir trouvé la parade. De même, M. Montebourg envisage d’étendre la participation aux salariés des PME de moins de 50 personnes, aujourd’hui exclues de ce dispositif. « La priorité, c’est le pouvoir d’achat des ménages », dit-il.

« Surveiller, réguler, encadrer »

Soucieux de n’oublier personne parmi l’électorat de gauche, M. Montebourg annonce entre autres propositions vouloir revaloriser de 3,7 milliards d’euros par an les salaires des enseignants, « notamment dans les zones les plus difficiles ». Il prévoit aussi de recruter 5 000 fonctionnaires par an dans les hôpitaux (pour un coût de 300 millions d’euros) et « au moins » 10 000 policiers et gendarmes sur la durée du quinquennat. « Je trouve scandaleuse la chasse aux fonctionnaires » lancée par François Fillon, « un libéral brutal », affirme l’ex-ministre.

Pour financer ce programme, M. Montebourg a des solutions simples, simplistes diront ses détracteurs. Tout d’abord, il compte réformer le pacte de responsabilité de François Hollande, notamment en excluant du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) les banques et la grande distribution, qui ne sont pas exposées à la concurrence internationale. Objectif : récupérer 10 milliards d’euros par an ! De même, il espère économiser 5 milliards d’euros par an en rationalisant la politique d’achat des organismes publics.

Plus polémique, le candidat à la primaire à gauche propose de créer une « taxe sur les superprofits des banques », qui doit rapporter 5 milliards d’euros par an. Même si son entourage s’en défend, cette mesure s’apparente à un symbole pour la gauche, une sorte de déclinaison de la taxe à 75 % de M. Hollande : en annonçant en février 2012 qu’il taxerait les revenus supérieurs à 1 million d’euros, le candidat du PS avait pris l’avantage sur Nicolas Sarkozy dans la campagne. « Il ne s’agit pas de punir les banques mais de surveiller, réguler, encadrer », plaide Christian Paul, député (PS) de la Nièvre et coordinateur de la campagne.

Pour clouer le bec à ceux qui l’accuseraient de laxisme, Arnaud Montebourg assure que son programme respectera les règles européennes. Mieux, son « scénario de décollage économique » permettra de ramener le déficit public à 2,5 % du produit intérieur brut en 2022 tout en faisant baisser le chômage à 6,1 %, selon les calculs de Mathieu Plane, économiste à l’OFCE et soutien du candidat. « La croissance, on ne l’attend pas comme on attend Godot, on la provoque, on la stimule », assume M. Montebourg.

Une campagne difficile à financer

Tous les candidats l’affirment : faute d’argent, ils pèsent chaque dépense au trébuchet. « Nous avons dû annuler trois meetings », assure Michel Piloquet, trésorier d’Arnaud Montebourg. Au total, l’ancien ministre estime avoir besoin de 400000 à 450000 euros pour mener sa campagne de la primaire. Or, il n’a pour l’instant récolté que 215000 euros auprès de 495 donateurs, auxquels il faut ajouter 50000 euros accordés par le parti socialiste à chacun des candidats issus de ses rangs. Benoît…