Jean-Pascal Tricoire, le PDG de Schneider Electric au siège du groupe, à Paris. | MIGUEL MEDINA / AFP

Baisser l’impôt sur les sociétés. Le patronat en rêvait, le Parlement l’a enfin voté en décembre 2016. Bingo ? Pas pour tout le monde. Cette année, la diminution de la pression fiscale va paradoxalement coûter cher à Schneider Electric. La réforme annoncée va amputer de… 120 millions d’euros le bénéfice net que le champion français des prises et des interrupteurs s’apprête à publier pour 2016, a-t-il annoncé lundi 9 janvier. Et le groupe n’est pas le seul poids lourd dans ce cas.

Au départ, il s’agit pourtant d’un joli cadeau promis aux entreprises. A l’approche de la présidentielle, le gouvernement a choisi de réduire tant l’impôt sur le revenu des classes moyennes que celui sur les sociétés. Son taux doit être progressivement ramené de 33,3 % à 28 %, afin de se rapprocher de la moyenne européenne. Les PME seront les premières à en profiter. Le tour des grands groupes viendra en 2020. Sur le papier, c’est « une très bonne nouvelle pour nous comme pour l’ensemble des sociétés françaises », se félicite-t-on chez Schneider.

Moindres de ses économies futures

Dans l’immédiat, cependant, l’héritier des maîtres des forges du Creusot ne va pas bénéficier de la baisse pour une raison simple : il ne paye déjà aucun impôt sur ses bénéfices en France. Et pour cause. Si le groupe est très rentable à l’étranger, ses activités dans l’Hexagone perdent de l’argent. Depuis des années, l’entreprise accumule ainsi un déficit, qu’elle reporte d’exercice en exercice, et qui doit lui permettre de ne pas verser d’impôts, ou d’en verser moins, lorsque le temps des profits sera revenu. Au dernier pointage, fin 2015, Schneider affichait ainsi en France un report déficitaire de 560 millions d’euros. Soit autant d’économies à venir.

Le problème, c’est que la baisse de l’impôt votée par le Parlement réduit la valeur de ces économies futures. Schneider ne peut plus espérer récupérer sur le terrain fiscal que 28 % de ses pertes passées, au lieu de 33,3 %. C’est ce moindre gain à terme que le groupe va prendre en compte en réduisant d’autant ses profits dès 2016.

Les sociétés n’ont pas le choix, confirment les fiscalistes. « Dès lors que la loi votée est claire et donne un calendrier précis, l’impact financier de la mesure doit être considéré comme certain, indique Jean-Pierre Lieb, un ancien du fisc devenu avocat chez EY. Les entreprises doivent ajuster leurs comptes en conséquence. »

Schneider est le premier à l’annoncer. D’autres grands groupes qui disposent de reports déficitaires, comme Total ou Vivendi, devraient suivre. La facture totale de la « bonne nouvelle » devrait être connue dans quelques mois.