Au nom de leur religion, les parents musulmans ne peuvent prétendre que leurs filles soient exemptées de cours de natation mixtes à l’école, a jugé mardi 10 janvier la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), donnant tort à la famille turco-suisse qui l’avait saisie.

Si la CEDH a reconnu que la fermeté des pouvoirs publics pour contraindre les filles à participer aux cours de natation est une « ingérence dans la liberté de religion » des familles concernées, elle a toutefois affirmé que cette ingérence était justifiée au nom de « l’intérêt des enfants à une scolarisation complète, permettant une intégration sociale réussie selon les mœurs et coutumes locales », ce qui « prime » sur la volonté des parents.

Cet arrêt n’est pas définitif, les plaignants ont trois mois pour demander un nouvel examen du dossier par la Cour, que celle-ci n’est toutefois pas tenue de leur accorder.

Lutter contre l’« exclusion sociale »

La Cour avait été saisie par un couple résidant à Bâle (Suisse) et possédant la double nationalité turque et suisse. Ces parents s’étaient vu infliger une amende d’un peu moins de 1 300 euros pour avoir refusé, au nom de leurs convictions religieuses, d’autoriser leurs deux filles, alors âgées de 7 et 9 ans, à aller à la piscine dans le cadre de leur scolarité. Le cadre réglementaire applicable prévoyait de possibles exemptions pour des raisons religieuses, mais seulement à partir de la puberté.

Les parents avaient contesté cette sanction, en vain, devant les tribunaux suisses, puis s’étaient tournés devant les juges européens en arguant d’une violation de leur liberté de conscience et de religion. La CEDH leur a donné tort, en relevant que les pouvoirs publics helvétiques avaient pour objectif la « protection des élèves étrangers contre tout phénomène d’exclusion sociale ». La cour basée à Strasbourg a argumenté :

« L’intérêt de l’enseignement de la natation ne se limite pas à apprendre à nager, mais réside surtout dans le fait de pratiquer cette activité en commun avec tous les autres élèves, en dehors de toute exception tirée de l’origine des enfants ou des convictions religieuses ou philosophiques de leurs parents. »

En outre, « des aménagements significatifs ont été offerts » à la famille, « notamment la possibilité (pour les filles) de porter le burkini » (tenue de bain intégrale), ont observé les magistrats européens.