Henri Guaino (à gauche) et Frédéric Lefebvre, à l’Assemblée nationale en janvier 2015. | JACQUES DEMARTHON / AFP

Ce sont les « cas » jugés comme les plus sensibles chez Les Républicains (LR). Ceux qui ont donné lieu à de vives discussions, ces derniers jours, lors des réunions de la Commission d’investiture nationale (CNI), dans l’optique du conseil national du parti, samedi 14 janvier, lors duquel les investitures pour les prochaines élections législatives doivent être entérinées.

Cette instance, présidée par le député filloniste Jean-François Lamour, s’est réunie du 10 au 13 janvier pour attribuer les investitures sur les 577 circonscriptions existantes. Parmi elles, le choix d’accorder – ou non – une circonscription aux ex-sarkozystes Henri Guaino et Frédéric Lefebvre, ainsi qu’au juppéiste, Maël de Calan, a suscité le plus de discussions. Le Monde a eu connaissance des derniers arbitrages effectués par la CNI les concernant.

Henri Guaino, une circonscription sous condition

Selon les informations du Monde, la CNI a décidé de « réserver » la troisième circonscription des Yvelines, jusque-là détenue par l’ancien conseiller spécial de Nicolas Sarkozy à l’Elysée. « Nous avons décidé de n’investir aucun candidat, pour l’instant, sur cette circonscription. Potentiellement, cela peut être Henri Guaino, mais cela dépend de son attitude », explique un membre de la CNI.

Traduction : si le candidat à la présidentielle de 2017 met un terme à ses critiques contre François Fillon et renonce à sa candidature élyséenne, il pourra de nouveau être réinvesti. Dans le cas contraire, il sera sanctionné et sa circonscription sera attribuée à un autre candidat. « Ce n’est pas nous qui nous éloignons de lui, mais lui qui s’éloigne de nous », observe M. Lamour, président de la CNI.

Mais M. Guaino a déjà indiqué qu’il n’entendait pas entrer dans le rang pour garder sa circonscription. « On n’a jamais rien obtenu de moi ni par la menace, ni par l’intimidation, ni par le chantage », a-t-il affirmé le 27 décembre sur RTL. Fin décembre, l’ex-séguiniste avait signé une tribune dans Le Monde, où il avait dressé un parallèle entre le programme austère de François Fillon et celui de Pierre Laval, qui, en 1935, avait choisi la déflation pour relancer l’économie du pays.

Frédéric Lefebvre, une circonscription (aussi) sous condition

Autre cas sensible : celui de Frédéric Lefebvre. Candidat sortant, en tant que député des Français de l’étranger, il aurait dû théoriquement être réinvesti, en juin, lorsque la CNI – alors présidée par le sarkozyste Christian Estrosi – avait rendu ses premiers arbitrages. Mais sa circonscription avait été gelée sur ordre de M. Sarkozy. Ce dernier avait souhaité sanctionner son ancien fidèle, à qui il reprochait de se présenter à la primaire contre lui et ses critiques.

M. Lefebvre, qui avait soutenu Alain Juppé pendant la primaire, devrait finalement être réinvesti dans la première circonscription des Français de l’étranger (Etats-Unis, Canada) lors du conseil national de LR. Cette perspective a suscité une levée de boucliers des sarkozystes en CNI, en particulier de la part de Laurent Wauquiez.

Le camp Fillon se dit prêt à le réinvestir mais à condition que M. Lefebvre exprime plus clairement son soutien au candidat de la droite à la présidentielle. « On vérifie son engagement sans faille derrière Fillon », explique un membre de la direction, qui n’a pas apprécié que M. Lefebvre soutienne la loi Macron en 2015 et s’affiche aux côtés de l’ex-ministre de l’économie en septembre 2016, lors d’un colloque à Lyon.

Maël de Calan obtient sa circonscription

Le cas de Maël de Calan, jeune élu juppéiste du Finistère, avait suscité de vives tensions entre les camps Juppé et Sarkozy pendant la campagne de la primaire. Alors que le maire de Bordeaux en avait fait un casus belli, en exigeant que l’investiture soit accordée à son protégé dans la circonscription de Morlaix, la CNI en avait décidé autrement en juin. Les sarkozystes avaient pesé de tout leur poids pour barrer la route de cet élu de 36 ans, président de la fédération départementale LR du Finistère et pilier de l’équipe de campagne de M. Juppé lors de la primaire, en défendant les intérêts de la maire sarkozyste de Morlaix, Agnès Le Brun. Faute d’accord, la décision avait été reportée au bon vouloir du vainqueur de la primaire.

Sept mois plus tard, Maël de Calan a finalement obtenu ce qu’il voulait : il portera bien les couleurs de LR dans la quatrième circonscription du Finistère. Un bras de fer a eu lieu entre le sarkozyste Laurent Wauquiez et le camp Fillon, mercredi, en CNI, sur son cas. Face à l’opposition du premier, le secrétaire général de LR, Bernard Accoyer, est intervenu pour obtenir un consensus et faire approuver, sans vote, l’investiture du juppéiste.

En dehors de ces cas particuliers, M. Fillon devra également trouver un accord avec les centristes de l’UDI et composer avec la fronde naissante des cumulards.