Jean-Luc Mélenchon est sur un petit nuage. La campagne du candidat est dans une dynamique ascendante : ses meetings font le plein et, avec 517 promesses de parrainages récoltées à ce jour, il s’est dit assuré, jeudi 12 janvier, d’être présent au premier tour de la présidentielle, le 23 avril. Un bras de fer se profile cependant sur les législatives entre La France insoumise – son nouveau mouvement – et le Parti communiste (PCF), qui a choisi à une courte majorité d’appeler à voter pour lui.

Pour le PCF, cette élection est le véritable enjeu de 2017 : faire élire des députés offre non seulement une vitrine médiatique mais ouvre surtout droit à un financement public. Depuis plusieurs mois déjà, le parti de Pierre Laurent a commencé à désigner ses candidats, ce qui a pu agacer ses potentiels alliés. Un conseil national devrait poursuivre les investitures les 14 et 15 janvier. En 2012, le Front de gauche n’avait fait élire que dix députés et s’était vu dans l’obligation de négocier avec des élus ultramarins pour former un groupe. Cinq ans plus tard, la plupart de leurs députés, dont certains sont élus depuis 1978, sont touchés par le cumul des mandats. Seuls quatre d’entre eux devraient se représenter : André Chassaigne (Puy-de-Dôme), Marie-George Buffet (Seine-Saint-Denis), Patrice Carvalho (Oise) et Nicolas Sansu (Cher).

Casus belli

Si le PCF est bien placé pour savoir que les passages de témoin peuvent s’avérer délicats, se profile une autre difficulté : La France insoumise initie également son propre processus de désignation. Une centaine d’investitures ont déjà été validées et d’autres devraient l’être ce week-end. Si rien ne bouge, des circonscriptions pourraient donc voir des candidatures concurrentes aux législatives de la part de formations qui soutiennent le même candidat à la présidentielle. Deux des quatre sortants communistes, André Chassaigne et Nicolas Sansu, ont ainsi eu la mauvaise surprise de découvrir que des partisans de La France insoumise avaient été désignés dans leurs circonscriptions. « Il ne s’agit pas d’un signal particulier, assure Manuel Bompard, directeur de campagne de M. Mélenchon. On travaille sur des candidatures dans les 577 circonscriptions. »

Autre exemple qui crispe les communistes, la candidature à Montreuil (Seine-Saint-Denis) d’Alexis Corbière, porte-parole de M. Mélenchon, dans une circonscription autrefois détenue par le PCF, mais remportée en 2012 par le socialiste Razzi Hammadi. Soutenu par la formation de Pierre Laurent, Gaylord Le Chequer, adjoint au maire PCF de Montreuil, Patrice Bessac, est, lui, déjà en campagne.

Fin 2016, une réunion a eu lieu entre le PCF et La France insoumise, mais n’a pas abouti. En cause : une charte que le mouvement de M. Mélenchon demande de signer à ses candidats. On y trouve notamment l’engagement de se rattacher à une association de financement unique et de « respecter la discipline de vote du groupe ». « C’est un document qui contient des marqueurs éthiques et qui nous permet de garantir une cohérence nationale entre la présidentielle et les législatives », explique M. Bompard.

Pour les communistes, c’est un casus belli. Jeudi, dans une interview à Mediapart, M. Laurent a dénoncé « une attitude très rigide de [leurs] partenaires » et réaffirmé que son organisation ne signerait pas cette charte. Une nouvelle rencontre doit avoir lieu entre les deux parties courant janvier mais la date n’a toujours pas été calée. M. Chassaigne met en garde celui qu’il avait affronté en 2011 pour la candidature à la présidentielle : « Tout cela crée un trouble terrible. Ça pourrait avoir énormément de retombées pour la campagne de Mélenchon, dont les conséquences sont, selon moi, sous-estimées par son équipe. »