Un membre de la fanfare militaire du Gabon devant le stade d’Angondjé, ou stade de l’Amitié sino-gabonaise, à Libreville. | MARCO LONGARI / AFP

Cinq ans après avoir accueilli la première Coupe d’Afrique des Nations (CAN) de son histoire, une coorganisation avec son voisin équato-guinéen, le Gabon est de nouveau le pays hôte de la compétition, qui se déroule de samedi 14 janvier à dimanche 5 février. Alors que ce tournoi débute dans un contexte de crise politique – la réélection contestée d’Ali Bongo en septembre – et de crise économique – secteur pétrolier en difficulté –, que des opposants appellent même au boycottage, seize sélections africaines tenteront de succéder à la Côte d’Ivoire.

  • Des « Panthères » en difficulté et des retards dans les stades

Quart-de-finalistes en 2012, les Panthères gabonaises ne semblent pas cette fois être dans les meilleures conditions pour s’illustrer à domicile.

Dans le groupe A, en compagnie de la Guinée-Bissau, du Cameroun et du Burkina Faso, ne pas passer le premier tour serait une vraie contre-performance pour le Gabon. Mais alors que son nouveau sélectionneur espagnol, José Antonio Camacho, est arrivé il y a peu, les signaux ne sont pas positifs. Pour le premier match de Camacho, le Gabon s’est incliné 2-1 en match de préparation, à une semaine du match d’ouverture, face au club local du FC Mounana

La question des stades n’est également pas très engageante. Deux des quatre enceintes ont été inaugurées lundi 9 janvier… soit seulement cinq jours avant le lancement de la CAN. A Port-Gentil et à Oyem, le chef de l’Etat, Ali Bongo, a soigneusement évité de parler des retards dans les travaux. Sans compter que le stade Omar-Bongo, du nom de l’inamovible président aux 41 ans de règne mort en 2009, avait été recalé par la Confédération africaine de football (CAF) en octobre dernier, pour des retards pris dans la rénovation.

  • Qui pour succéder à la Côte d’Ivoire ?

En guise de favoris, trois équipes semblent se détacher. Malgré le forfait de Gervinho, les Eléphants de Côte d’Ivoire, tenants du titre, défendront encore une fois et en toute logique leur statut. Autres favoris : les Ghanéens. Quatre fois sacrés, la dernière fois en 1982, finalistes en 2010 et en 2015, demi-finalistes en 2012 et en 2013, les coéquipiers d’André Ayew figurent une nouvelle fois parmi les ténors.

Portés par ses nombreux joueurs, nés et formés en France (Riyad Mahrez, Yacine Brahimi ou Faouzi Ghoulam), les Fennecs algériens espèrent mettre fin à une disette de vingt-sept ans, depuis leur unique titre obtenu à domicile. Et ce, même s’ils sont mal embarqués lors des éliminatoires au Mondial 2018, avec un seul point en deux matchs…

CAN 2015 : Côte d'Ivoire tous les matchs et buts-parcours vers le final
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  • Des outsiders et des Petit Poucet

Plusieurs autres sélections pourraient également avoir leur mot à dire. Tout d’abord, les revenants égyptiens sont toujours redoutables dans cette compétition dont ils détiennent le record de victoires, avec sept trophées. Absente depuis l’édition 2010, année d’un troisième succès d’affilée, l’Egypte compte bien se rappeler au bon souvenir de ses adversaires.

Jamais titré (finaliste en 2002), le Sénégal s’appuie sur une nouvelle génération de talents qui évoluent dans de grands clubs, comme Kalidou Koulibaly (Naples) ou Sadio Mané (Liverpool). En lice pour la qualification au prochain Mondial, la République démocratique du Congo est ambitieuse et veut revivre ses sacres de 1968 sous le nom de Congo Kinshasa, et de 1974 sous l’appellation de Zaïre.

Enfin, trois équipes paraissent condamner à faire de la figuration. La Guinée-Bissau, ancienne colonie portugaise de 1,7 million d’habitants, fera ses grands débuts. Le Zimbabwe disputera sans grand espoir son troisième tournoi (2004 et 2006). Enfin, l’Ouganda, finaliste en 1978, ne semble pas pouvoir briller pour sa sixième participation.

  • Qui pour prendre la relève des Drogba, Eto’o et Touré ?

Après les retraites internationales des vedettes Didier Drogba (Côte d’Ivoire) et Samuel Eto’o (Cameroun), tous deux partis à l’issue du Mondial 2014 et déjà absents lors de la CAN 2015, une autre star africaine a choisi en septembre de ne plus porter le maillot de sa sélection nationale. Le milieu de terrain de Manchester City, Yaya Touré, vainqueur de la dernière CAN avec les Ivoiriens, ne défendra pas son titre au Gabon.

La place est libre pour des nouveaux talents, comme le Sénégalais Sadio Mané ou l’Egyptien Mohamed Salah (AS Rome). Mais seuls deux joueurs semblent avoir le potentiel et la carrure pour devenir des fuoriclasse : le Gabonais Pierre-Emerick Aubameyang et l’Algérien Riyad Mahrez. Le premier, qui s’illustre sous les couleurs du Borussia Dortmund, évoluera au pays devant ses supporteurs. L’ancien joueur stéphanois, né à Laval (Mayenne), vient juste d’être élu meilleur joueur du début de saison en Bundesliga grâce à 33,6 % des votants. Déjà auteur de 43 buts en 55 matchs l’an passé, il poursuit sur ce rythme infernal avec 21 buts en 26 rencontres.

Le deuxième, champion d’Angleterre en titre, est devenu essentiel depuis le bon parcours de l’Algérie au Mondial en 2014. A l’époque, le natif de Sarcelles (Val-d’Oise) n’avait participé au Brésil qu’à un seul des quatre matchs disputés par les Fennecs, éliminés 2 à 1 en huitièmes de finale par le champion du monde allemand. Malgré un début de saison mitigé avec Leicester, qui n’est classé que 15e, le talentueux milieu de terrain a été élu en 2016 meilleur joueur de Premier League et joueur africain de l’année. Il s’est aussi classé récemment à la 7place du Ballon d’or.

  • Trois irréductibles sélectionneurs au milieu d’une légion étrangère

Hervé Renard, sélectionneur du Maroc, tentera de remporter sa troisième CAN. | NEZAR BALOUT / AFP

La situation n’a pas évolué. En 2015, ils étaient déjà trois sélectionneurs africains à diriger l’une des seize équipes qualifiées pour la CAN. En 2017, ils sont toujours trois, mais deux d’entre eux sont novices : le Sénégalais Aliou Cissé et le Zimbabwéen Callisto Pasuwa. A la tête de la RDC depuis 2014, Ibenge est le seul à disputer sa deuxième compétition de suite. Aux commandes des treize autres sélections, on trouve deux Belges, un Franco-Polonais, deux Portugais, un Serbe, un Argentin, un Espagnol, un Israélien et quatre Français.

Traditionnellement en minorité sur les bancs de touche de la CAN, les entraîneurs africains possèdent cependant un record de victoires dans la compétition. Le Ghanéen Charles Kumi Gyamfi et l’Egyptien Hassan Shehata ont remporté trois fois le trophée avec leur pays. Un record qu’un entraîneur étranger peut mettre en péril dès cette année. Le Français Hervé Renard, vainqueur avec la Zambie en 2012 et la Côte d’Ivoire en 2015, tentera une difficile passe de trois, cette fois avec le Maroc, qui est loin d’être favori.

  • « Une participation » de la Ligue 1 en baisse

Ils seront 34 joueurs de Ligue 1 à disputer la 31édition de la CAN. A titre de comparaison, la Premier League anglaise compte 20 internationaux africains sélectionnés, la Serie A italienne et la Jupiler Pro League belge auront chacune 14 représentants, tandis que seulement 10 joueurs de la Liga espagnole se rendent au Gabon.

Le championnat de France fournit toujours le plus gros contingent de footballeurs, mais la tendance est plutôt à la baisse par rapport aux trois dernières compétitions. En effet, en 2015, 52 internationaux africains jouaient en Ligue 1, ils étaient 50 en 2012 et 40 en 2013. A noter quelques absences dues à des blessures qui viennent faire baisser les statistiques : le Marocain de Nice, Younès Belhanda, celui de Saint-Etienne, Oussama Tannane ou encore l’Algérien de Montpellier, Ryad Boudebouz. Et quelques joueurs qui évoluent dans des divisions inférieures.

Si le club français le plus représenté n’est autre que Lille, avec cinq joueurs présents au Gabon (les Marocains Mounir Obbadi et Hamza Mendyl, les Maliens Yves Bissouma et Youssouf Koné, ainsi que le Tunisien Naïm Sliti), les Angevins sont les plus pénalisés. A Lille, seul Naïm Sliti est titulaire, alors qu’à l’inverse les quatre joueurs d’Angers sélectionnés (le Camerounais Karl Toko-Ekambi, l’Ivoirien Nicolas Pépé et les Sénégalais Cheikh Ndoye et Famara Diédhiou) sont tous des pièces majeures de leur club.

  • Une proportion énorme de joueurs formés en France

Cheikh NDoye sous les couleurs de son club, Angers. | JEAN-FRANCOIS MONIER / AFP

Le chiffre est impressionnant et montre les liens forts entre le football français et le football africain. Selon un rapport de la Direction technique nationale de la Fédération française de football, 104 joueurs issus des 16 sélections qualifiées pour la CAN 2017 ont été formés en France, soit 28 % des 368 joueurs qui s’apprêtent à disputer la compétition. Parmi cette centaine de joueurs, 86 sont issus d’un centre de formation agréé par la FFF (23 %), tandis que 18 viennent du football amateur français. Seules deux nations n’ont aucun joueur formé dans l’Hexagone : l’Egypte et l’Ouganda.