Manifestant palestinien le 9 décembre devant la colonie  la colonie israélienne de Qadumim (Kedumim). | JAAFAR ASHTIYEH / AFP

Editorial. La France a raison de continuer à se battre pour favoriser une solution du conflit israélo-palestinien. Il faut saluer les initiatives prises par le président François Hollande en ce sens et la persévérance de son ministre des affaires étrangères, Jean-Marc Ayrault, dans leur mise en œuvre. Il en va ainsi de cette deuxième conférence internationale réunie dimanche 15 janvier à Paris. Elle n’amènera pas la paix dans les prochains mois, elle ne relancera pas par miracle un dialogue israélo-palestinien prometteur, elle a pourtant tout son sens : dans l’intérêt des deux parties, il ne faut pas abandonner la solution dite des deux Etats – un Etat palestinien vivant en paix à côté d’Israël. Or, sur le terrain, cette solution devient chaque jour plus improbable.

D’un côté, la politique ininterrompue d’implantations israéliennes dans la partie orientale de Jérusalem et en Cisjordanie, sous l’égide du gouvernement le plus à droite qu’Israël ait jamais connu, rogne, physiquement, chaque jour davantage la possibilité d’un Etat palestinien viable, sur un territoire continu. De l’autre, une population palestinienne découragée, qui se sent de moins en moins représentée par la fraction du mouvement national palestinien que dirige Mahmoud Abbas – tout juste réélu à la tête du Fatah –, se réfugie de plus en plus dans l’idée d’un seul Etat au sein duquel les Palestiniens finiront par supplanter les Israéliens. En général, et plus encore dans ce cas particulier, les Etats dits binationaux sont les ingrédients d’une guerre civile permanente.

On dit encore qu’il y a d’autres priorités pour stabiliser la région et que, dans un Moyen-Orient en plein chaos, l’heure n’est pas pour Israël de prendre le moindre risque. Mais cela fait bientôt cinquante ans qu’Israël, à la suite de la guerre de juin 1967, occupe ces territoires palestiniens. L’occupation devient la norme et, avec elle, son cortège de violences, de part et d’autre, d’humiliations et de répression permanente.

Marche vers une tragédie

Dans un texte « profondément équilibré », selon l’expression d’Elie Barnavi, ancien ambassadeur d’Israël à Paris, le Conseil de sécurité de l’ONU n’a pas dit autre chose quand, le 23 décembre, il a voté – grâce à l’abstention de l’administration Obama – contre la politique d’implantation israélienne en Cisjordanie. A Paris, les Israéliens et les Palestiniens seront absents en raison du refus de Benyamin Nétanyahou. Mais quelque 70 pays – dont les cinq membres du Conseil de sécurité de l’ONU et l’ensemble du G20 – et organisations internationales devaient rappeler leur attachement à la solution des deux Etats.

Plus de la moitié des membres du gouvernement Nétanyahou se disent ouvertement opposés à la solution des deux Etats. Leur porte-parole, le ministre de la défense, Avigdor Lieberman, a qualifié la conférence de Paris de « nouveau procès Dreyfus ». Ce n’est pas seulement injurieux pour la France, c’est considérer que les pays réunis ce dimanche 15 janvier à Paris sont tous mus par un seul sentiment : l’antisémitisme.

Au-delà de cette insulte, qui ne mérite pas de réponse, la coalition que dirige M. Nétanyahou compte sur Donald Trump pour donner son quitus à la politique des implantations. Elle est encouragée par la nomination par le président élu d’un ambassadeur, David Friedman, qui est un militant actif de la colonisation. Cette seule perspective justifie la conférence de Paris : il faut arrêter cette marche vers une tragédie.