Roger Federer, lors d’un entraînement à Melbourne le 12 janvier. | PAUL CROCK / AFP

On l’avait quitté grimaçant, en demi-finales de Wimbledon, où il s’était pris les pieds dans le gazon, au propre comme au figuré, battu par le Canadien Milos Raonic. Un dos qui couine, un genou (gauche) qui grince – ce qui lui avait valu de subir une arthroscopie en février –, et voilà papy Federer contraint de mettre un terme à sa saison dès la fin juillet 2016 pour laisser son corps au repos. Conséquences : six mois d’absence et un circuit orphelin de sa coqueluche.

Aussi son retour à la compétition, au début de janvier à Perth (Australie), à l’occasion de la Hopman Cup, a-t-il créé l’événement. La première séance d’entraînement du Suisse lors de ce tournoi d’exhibition mixte a attiré à elle seule plus de 6 000 spectateurs. Malgré son élimination avant la finale, l’ancien numéro un mondial a jugé sa rentrée sur les courts satisfaisante, assurant n’être plus du tout préoccupé par son genou. « Physiquement, j’ai parfaitement assimilé la répétition des matchs », s’est-il félicité.

Place désormais à la « vraie » compétition. Car c’est à Melbourne, où il lui faudra cette fois tenir la distance au meilleur des cinq sets, qu’il passera le premier test sérieux de la saison. Pour son premier tour, le Suisse affronte ce lundi l’Autrichien Jürgen Melzer, 300e mondial. Un retour que ne manqueront pas d’ausculter les spectateurs autant que les joueurs, ces derniers ayant eux aussi fait savoir à quel point la présence de « Roger » leur avait manqué. Passé cet intermède – un « avant-goût de la retraite », comme il l’a lui-même qualifié –, tous sont pressés de se faire une idée de son état physique.

« Début de saison épique »

Après l’une des saisons les moins fertiles de sa carrière (7 tournois disputés, 1 seule finale et aucun titre), le Federer 2017 sera-t-il à nouveau compétitif ? A 35 ans, le recordman de victoires en Grand Chelem aborde son 18e Open d’Australie d’affilée avec un mélange d’impatience et d’incertitude : « Je ne sais pas de quoi je vais être capable, confiait-il en décembre dans une interview au New York Times. Les spectateurs non plus, et mes adversaires n’auront aucune idée de mon niveau, donc, je crois que ça va être assez excitant pour tous. »

Reste que son classement ne lui assure pas une rentrée des plus aisées. Retombé au 17e rang mondial – il n’avait plus flirté avec le top 20 depuis 2001 –, Roger Federer héritera d’un gros client dès le troisième tour. Ce pourrait être Tomas Berdych, avant une confrontation éventuelle avec Kei Nishikori en huitièmes et Andy Murray en quarts. Mais lui préfère s’affranchir de toute pression supplémentaire, et la décharger sur les épaules de ses rivaux : « Franchement, 16e ou 17e, cela ne change pas grand-chose pour moi. Ce sont plutôt mes adversaires qui seront un peu nerveux... », assure-t-il.

A l’en croire, « tous les ingrédients sont réunis pour que 2017 soit une saison extraordinaire. Il y a une grosse attente autour d’Andy [Murray]. Autour de Novak [Djokovic] aussi. Rafa [Nadal], évidemment, suscite toujours autant d’intérêt. Et j’espère que mon retour sera lui-même un épisode sympa à suivre. Je crois que le début de l’année, en particulier l’Open d’Australie, sera épique. » Le retour du « maître » en a presque occulté les autres enjeux de ce début de saison...

A commencer par le duel entre le nouveau numéro un mondial, Andy Murray, et son dauphin serbe, six fois vainqueur à l’Open d’Australie. En cinq finales (dont quatre perdues face à Djokovic), l’Ecossais n’a encore jamais soulevé le trophée à Melbourne. Mais il veut croire que la malédiction est sur le point de se briser, répétant avoir enfin confiance en son jeu, de par son nouveau statut. A Doha, le 7 janvier, la première explication entre les deux favoris de la quinzaine a tourné à l’avantage du Serbe (6-3, 5-7, 6-4), mettant fin à une série de 28 victoires de Murray.

Novak Djokovic, tenant du titre, veut tenter de se relancer après une fin d’année mitigée. A l’automne, il avait confié de façon déconcertante se sentir « épuisé mentalement et émotionnellement » depuis son titre à Roland-Garros. « Je ne ressens plus cette joie intérieure de jouer, avait-il développé. Ma priorité est désormais de retrouver avant toute chose cette joie intérieure, de me sentir heureux sur le court. »

« Etre humain divin et merveilleux »

Pour ce faire, le numéro deux mondial a procédé a des changements notables dans son entourage. Après trois années fructueuses, Djokovic et son très médiatique coach Boris Becker ont décidé d’un commun accord de mettre un terme à leur collaboration. Depuis Bercy, on peut désormais apercevoir à son chevet le non moins extravagant Pepe Imaz. L’Espagnol, ancien joueur classé 148e mondial, a créé une académie pour enseigner le tennis avec pour devise :  Amor y paz (amour et paix).

Officiellement, Pepe fait office de coach mental, mais les médias espagnols n’hésitent pas à le qualifier de « gourou ». Ce qui n’a pas l’air de l’affecter, comme il le confiait à L’Equipe au début du mois de janvier : « Tu veux m’appeler gourou ? Appelle-moi gourou. Un fou ? Très bien ! Que veux-tu que j’y fasse ? L’étiquette, ce n’est pas moi qui la colle. Je poursuis ma route dans ma vérité, avec de l’amour dans mes actes de tous les jours. Comme chacun d’entre nous, je suis un être humain divin et merveilleux qui veut se reconnecter à sa lumière. »

L’Espagnol prône une maîtrise émotionnelle en fondant ses actes sur l’amour et le respect. Sur ce point, son illustre disciple a encore des progrès à faire. En finale de Doha, il y a quelques jours, Novak Djokovic a semble-t-il mal assimilé les préceptes. Frustré d’avoir perdu un point, le Serbe a déchiré son tee-shirt, cassé une raquette, et, plus grave, balancé une balle dans le public, atteignant une spectatrice. Un coup de sang qui ne l’a pas empêché de s’imposer, retrouvant ainsi le sentier de la victoire. Le chemin de l’amour, lui, attendra.

Djokovic smashes racket, takes point penalty and loses game ATP Doha
Durée : 01:12