L'Oculus Rift est un casque de réalité virtuelle commercialisé en mars 2016. | Pierre Trouvé / Le Monde

Mark Zuckerberg a témoigné, mardi 17 janvier, dans un procès à haut risque pour Facebook. A la barre, le fondateur et PDG du réseau social a rejeté les accusations visant Oculus, le spécialiste des casques de réalité virtuelle racheté début 2014 pour 2 milliards de dollars (1,87 milliard d’euros). Celui-ci est accusé par la société américaine ZeniMax de lui avoir volé certaines de ses technologies.

« Les produits d’Oculus ont été conçus avec des technologies d’Oculus », a assuré M. Zuckerberg, interrogé pendant plus de deux heures devant un tribunal de Dallas (Texas). « Lorsque vous annoncez une importante transaction, il est relativement fréquent de voir des gens sortir du bois et réclamer leur part, a-t-il ajouté. Comme la majorité des personnes ici présentes, je n’avais jamais entendu parler de ZeniMax avant cette affaire. »

ZeniMax a déposé plainte en mai 2014, deux mois après l’acquisition d’Oculus par Facebook. Le procès s’est ouvert lundi 9 janvier et devrait prendre fin la semaine prochaine. L’entreprise, qui détient plusieurs studios de développement de jeux vidéo, estime avoir été victime de « l’un des plus gros braquages technologiques de l’histoire ». Elle réclame ainsi jusqu’à 2 milliards de dollars de dédommagements.

Collaboration puis recrutement

Les faits remontent à 2012. A l’époque, Oculus n’est encore qu’une petite start-up qui vient de lever 2,4 millions de dollars sur KickStarter, une plate-forme de financement participatif, afin de fabriquer un casque de réalité virtuelle. Pour concevoir un premier prototype, son fondateur, Palmer Luckey, à peine 19 ans, se rapproche de John Carmack, une figure historique du jeu vidéo à la tête de l’un des studios de ZeniMax.

Pendant plusieurs mois, les deux hommes collaborent pour démontrer le potentiel de la réalité virtuelle, une technologie tombée dans l’oubli après les nombreux échecs rencontrés dans les années 1990, notamment par Nintendo. Les premières démonstrations du casque suscitent l’enthousiasme. En 2013, la jeune société lève ainsi plus de 90 millions de dollars auprès de fonds de capital-risque. La même année, M. Carmack est recruté par Oculus au poste de directeur technique.

« M. Carmack a apporté des modifications capitales au prototype en se servant de recherches menées précédemment dans les bureaux de ZeniMax, sur des ordinateurs de ZeniMax et en utilisant les ressources de ZeniMax », fait valoir le plaignant. Interrogé la semaine dernière, le responsable a bien reconnu avoir emporté des milliers de lignes de code informatique au moment de son départ. « Je n’aurais pas dû faire cela », a-t-il concédé. Mais M. Carmack a également indiqué ne pas avoir réutilisé ces lignes de code chez son nouvel employeur.

« Un contentieux inutile »

Selon ZeniMax, la responsabilité de Facebook est aussi engagée, lui reprochant d’avoir précipité le rachat. Celui-ci a été conclu en seulement trois jours alors même qu’un dirigeant du réseau social avait fait part de ses doutes sur les déclarations des responsables d’Oculus. Facebook n’a ainsi pas pris connaissance d’un courrier que ZeniMax avait adressé un mois auparavant à la start-up pour la menacer de poursuites judiciaires.

« Aller vite augmente nos chances de mener une opération et nous permet d’éviter de payer beaucoup plus », a répondu M. Zuckerberg, mettant en avant la concurrence des autres grandes sociétés technologiques. Le patron du groupe californien a par ailleurs révélé que le montant global de la transaction s’élevait en réalité à 3 milliards de dollars. 700 millions supplémentaires ont en effet été versés pour conserver les principaux employés d’Oculus. La start-up a aussi touché 300 millions de plus après avoir atteint plusieurs objectifs.

Pour Facebook, la démarche de ZeniMax est « un contentieux inutile pour tenter de s’attribuer le mérite d’une technologie dont elle n’a pas eu la vision, l’expertise et la patience de développer ». Le réseau social rappelle que le plaignant n’a pas donné suite à une proposition d’investissements dans Oculus. « Ils se sentent humiliés de ne pas avoir investi dans la réalité virtuelle quand ils en ont eu l’occasion », a ainsi asséné l’avocat de Facebook.