« Mais qu’est-ce qui vous arrive, signora ? » Le titre, entre ironie et perplexité, barre une double page de l’édition de mardi du quotidien le plus lu d’italie, La Gazzetta dello Sport. Au lendemain d’une retentissante contre-performance contre la Fiorentina (défaite 1-2, la quatrième de la saison en championnat), la très austère Juventus Turin, club le plus titré sur la scène italienne surnommé « la Vecchia Signora [la vieille dame] » avec un subtil mélange d’affection et d’agacement, organisait lundi à Milan, dans le cadre assez inattendu du Musée des sciences et techniques, une soirée censée symboliser son nouveau visage (intitulée « Black and white and more »). L’idée directrice ? La mo-der-ni-té. Et le résultat ? Il était quelque peu déconcertant.

Le clou du spectacle était en effet la présentation du nouveau logo censé remplacer le visuel traditionnel du club, conçu par l’agence britannique Interbrand. A l’écusson à bandes verticales blanches et noires, rehaussé d’un animal cabré, d’une couronne et de trois étoiles d’or (chacune représentant dix titres de champion) succédera une sorte de double J stylisé blanc et noir, à la forme rappelant vaguement un écusson, qui figurera désormais sur tous les produits dérivés à l’effigie du club.

Aseptiser l’image

Bien sûr la « Vieille Dame » en a vu d’autres, les logos évoluent avec le temps, et ce n’est pas, en cent vingt ans, la première mue des visuels maison. Mais voilà, pour de nombreux supporteurs, ce relooking ressemble surtout à une tentative d’effacer l’histoire de la Juve, de l’aseptiser pour mieux en faire progresser l’audience dans le monde.

Sans rival sur la scène italienne (la Juve est en lice pour un sixième titre d’affilée), le club rêve de rattraper son retard sur les mastodontes allemands, anglais et espagnols. Ce logo épuré, à la modernité assumée, s’inscrit dans cette logique.

Sans surprise, le quotidien turinois La Stampa, historiquement lié à l’empire Agnelli, propriétaire de la Juve, a loué un choix « stylé » et « élégant ». Mais pour le reste, sur les réseaux sociaux, les supporteurs ont laissé éclater leur colère.

La médiocrité du jeu proposé actuellement par leur équipe, à des années-lumière des espérances affichées en début de saison, n’est sans doute pas étrangère à cet agacement. La Juventus est certes en tête de la Serie A, mais avec seulement un point d’avance sur ses poursuivants et un match en retard. Une situation à laquelle les Turinois n’étaient plus habitués, et qui a de quoi rendre nerveux les tifosi.