Documentaire sur Ciné+ Club à 20 h 45

Poster Original de Dune, 1975 | Nour Films

En 1974, Alejandro Jodorowsky achète les droits de l’un des plus prestigieux livres de science-fiction : Dune, de Frank Herbert, publié en 1965. La préparation de Dune durera quelques années et le film ne se fera jamais, les producteurs se retirant avant le début du tournage, affolés par un budget revu chaque jour à la hausse. Le documentaire de Frank Pavich est la trace la plus concrète d’un film entré dans la légende car resté à jamais virtuel.

Jodorowsky n’avait aucune intention de respecter le roman de Frank Herbert, mais comptait le recréer. A ses yeux, Dune n’était pas plus la propriété de son auteur que Don ­Quichotte n’était celle de ­Cervantès. Selon lui, l’intrigue, une guerre sans merci entre deux dynasties, les Atréides et les Harkonnen, avait suffisamment de matière surréaliste pour en faire le plus grand film de l’histoire du cinéma. Le réalisateur rêvait de créer « un sentiment de sacré, de liberté, avec de nouvelles perspectives capables d’ouvrir l’esprit ». L’équipe de Dune, devant et derrière la caméra, a été maintes fois racontée, et notamment dans ce documentaire.

La distribution est emblématique de ce moment d’utopie, souvent réalisée, que furent les années 1970 au cinéma. Salvador Dali et son égérie d’alors, Amanda Lear, Orson Welles, Mick Jagger et David Carradine s’engagent pour les rôles principaux. Pink Floyd et le groupe français Magma doivent signer la musique. Jean Giraud, alias Moebius, créateur de la bande dessinée ­Blueberry, doit réaliser les story-boards, avec l’illustrateur anglais Chris Foss. Le designer suisse H.R. Giger et le scénariste et spécialiste des effets spéciaux Dan O’Bannon, qui travailleront tous deux ensuite sur Alien (Ridley Scott), les rejoignent.

Plus de quarante ans après, ce film reste comme un gigantesque laboratoire de recherches, dont les travaux préparatoires se sont retrouvés réalisés ailleurs. David Lynch s’en empare à son tour et signe Dune en 1984, sans grand succès. Surtout, l’influence de ce film se lit dès la fin des années 1970, dans La Guerre des étoiles, de George Lucas, Alien et Blade Runner, de Ridley Scott, autant de films de science-fiction qui ont fait du cinéaste underground chilien le père spirituel d’une génération hollywoodienne enchaînant les succès. Une descendance que Jodorowsky n’avait jamais envisagée.

Jodorowsky’s Dune, de Frank Pavich (Fr.-EU, 2013, 90 min).