Manuel Valls, lors d’une visite à Dijon, le 13 janvier. | Ed Alcock / M.Y.O.P. pour "Le Monde"

La qualification a un goût amer. Manuel Valls sera au deuxième tour de la primaire à gauche. Mais en arrivant deuxième du premier tour avec 31 % sur un dépouillement partiel portant sur un tiers des bureaux de vote, dimanche 22 janvier, derrière Benoît Hamon, il est d’ores et déjà en ballottage défavorable pour la victoire finale.

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La campagne a été difficile pour l’ancien premier ministre, parti dans la position du favori. « Ça va, ça va, ça va ! », répétait-t-il encore en boucle il y a cinq jours, juste après avoir été victime d’une agression. Mardi 17 janvier, l’ex-premier ministre avait été giflé à la sortie de la mairie de Lamballe (Côtes-d’Armor), lors d’un déplacement en Bretagne, où il était accompagné du ministre de la défense et président de la région Bretagne, Jean-Yves Le Drian. Au passage du candidat, un jeune homme avait crié « Ici, c’est la Bretagne ! » puis l’avait frappé au visage, avant d’être plaqué au sol par le service d’ordre.

Déclaration de candidature poussive

M. Valls n’en était pas à sa première sortie mouvementée. Le 22 décembre, à Strasbourg, un individu avait voulu enfariner l’ancien premier ministre pour l’interpeller à propos du 49.3, l’article de la Constitution permettant de faire adopter une loi sans le vote du Parlement.
« 49.3 on n’oublie pas ! On n’oublie pas ! », avait lancé l’auteur de l’incident en s’adressant à Manuel Valls, lequel s’apprêtait à entrer dans un café. « C’est un bon présage. C’était de la farine sans gluten, donc j’apprécie l’attention », avait ironisé à sa sortie l’ancien maire d’Evry (2001-2011), dont le manteau avait entre-temps été nettoyé.

Après une déclaration de candidature poussive en décembre, M. Valls a passé ces dernières semaines à devoir se justifier sur son bilan à Matignon. L’ex-premier ministre a tenté de renouer avec lui-même, ses idées et son style. Incarnant la candidature de la gauche gouvernementale, l’ancien rocardien se pose en successeur de M. Hollande. Il a eu l’occasion d’assumer le bilan du quinquennat, qui est aussi le sien, lors des trois débats qui ont précédé la primaire.

Dans un entretien au Monde, M. Valls déclarait le 16 janvier :

« C’est souvent le problème de la gauche française : elle gouverne dans des moments difficiles, puis engage elle-même des procès en trahison. […] Gouverner, c’est difficile. Et moi, j’ai assumé les responsabilités. Je suis convaincu que la France a toujours besoin de la gauche et je veux l’incarner. »

Manuel Valls a été notamment la cible de ses concurrents au sein du Parti socialiste. M. Peillon a ainsi exprimé son « désaccord profond » avec lui sur une question « qui a marqué ce quinquennat », celle de l’accueil des réfugiés par la France. « J’ai le sentiment que les Français étaient plus généreux que leurs dirigeants », a glissé l’ancien ministre de l’éducation nationale, reprochant à l’ex-chef du gouvernement les « 5 000 » réfugiés accueillis par la France, « loin des 30 000 promis ».

Réputation de « droitier » au sein du PS

L’ancien maire d’Evry avait officialisé en décembre sa participation à cette seconde primaire, le temps de démissionner de son poste de premier ministre, qu’il occupait depuis 2014. La veille, François Hollande annonçait qu’il renonçait à briguer un second mandat de président de la République et lui laissait donc le champ libre pour entrer en campagne.

Fils d’un artiste peintre espagnol, M. Valls connaît son premier engagement politique en 1980. A 17 ans, il adhère au Mouvement des jeunes socialistes pour soutenir Michel Rocard, auprès de qui il se formera – l’ancien premier ministre, mort en juillet, l’avait reconnu comme un de ses « héritiers ». Né à Barcelone en 1962, naturalisé français vingt ans après, cet amateur de football fabriquera sa « marque », en parlant sécurité et laïcité bien avant que ces sujets ne soient à la mode socialiste.

Ces thématiques lui vaudront la réputation de « droitier » au sein du PS. Une ligne qu’il suivra comme ministre de l’intérieur (2012-2014), puis premier ministre (de mars 2014 à décembre 2016). Pour espérer l’emporter au deuxième tour, le candidat devra désormais convaincre le cœur de l’électorat du PS qu’il peut davantage incarner le rassemblement que Benoît Hamon. Une gageure pour celui qui a théorisé au cours du quinquennat « les gauches irréconciliables ».