Par Roger Moore, acteur

De nombreux pays dans le monde se sont engagés à interdire les cirques mettant en scène des animaux. L’Autriche, la Belgique, le Mexique et les Pays-Bas font partie de ceux qui ont choisi de mettre fin à ces numéros cruels. Pourtant, l’élégante et civilisée Principauté de Monaco, où je réside, accepte encore ces spectacles archaïques. Elle leur donne même une place d’honneur dans son Festival du cirque, qui pourrait au contraire mettre en valeur de fabuleux numéros d’acrobates et d’artistes.

L’opinion publique s’accorde à l’air du temps, et se prononce majoritairement en faveur de formes de divertissement qui n’impliquent ni maltraitance ni cruauté envers les animaux. Monsieur le ministre d’Etat [chef du gouvernement monégasque], vous pouvez mettre en place la législation nécessaire pour protéger ces êtres sensibles et intelligents qui ne méritent pas d’être enfermés et exploités pour le divertissement des foules.

Pour les animaux sauvages, vivre dans un cirque est comme être emprisonné chez le Dr. No. Quand ils ne sont pas forcés d’accomplir des numéros sous la menace de coups de fouet, ils vivent entravés par des chaînes. On leur refuse tout ce qui leur est naturel, il n’est donc pas étonnant qu’ils développent des comportements anormaux et névrotiques, comme mordre les barreaux de leur cage, tourner en rond ou s’automutiler. Quand ils tombent malades ou se blessent entre deux représentations, ils peuvent attendre des heures, voire des jours, avant d’être examinés par un vétérinaire spécialisé – si tant est qu’ils reçoivent un traitement quelconque.

Impardonnable

Des enquêtes de l’association de défense des animaux PETA et d’autres organisations ont mis au jour les punitions physiques et morales infligées aux animaux de cirque à travers le monde. Ils y sont battus, fouettés, électrocutés, enfermés, privés de nourriture pour les forcer à obéir. Le célèbre Askold Zapashny, directeur du cirque du Bolchoï de Moscou, qui est tête d’affiche de la 41e édition du Festival du cirque cette année, n’a pas hésité à justifier cette violence : « Ils doivent être battus, sinon ils ne comprennent pas. » Il faisait référence à une vidéo montrant des employés de cirque donnant des coups de poing et de marteau à de jeunes singes, fouettant un kangourou et des chiens, donnant un coup de pied à une autruche.

La princesse de Monaco, Stéphanie Grimaldi et sa fille Pauline Ducruet posent à côté d’une otarie, à Monaco, le 17 janvier. | ERIC GAILLARD / REUTERS

Des employés liés à la troupe de Zapashny auraient par ailleurs forcé un lionceau de quatre mois à sauter à travers un cercle de feu, avant de le revendre, battu et sévèrement brûlé. Cela n’est qu’un exemple parmi d’autres du traitement réservé aux animaux lorsqu’ils sont considérés comme de simples objets de divertissement, bons à exploiter, humilier puis jeter. Est-ce l’exemple que nous voulons donner à nos enfants ?

Dans les cirques, ces animaux majestueux qui, à leur état naturel, évoluaient à travers les plaines et les forêts, se voient privés de leur liberté, et leur espace vital limité à des cages de quelques mètres carrés. Ils mangent ce qui leur est jeté et ne peuvent pas choisir leurs partenaires. Leurs petits leur sont arrachés en bas âge pour être, eux aussi, dressés à exécuter des numéros dangereux. Il est impardonnable de tolérer que ces pratiques cruelles continuent.

Ce traitement n’est pas réservé aux animaux « exotiques ». L’année dernière, des militants d’Animal Defenders International ont filmé des chevaux, des ânes et des poneys du cirque itinérant Peter Jolly confinés dans un hangar surpeuplé. Comment accepter la réponse du porte-parole du cirque face à cette vidéo : « S’il s’agit de défense des animaux, ça ne nous intéresse pas » ?

The miserable life of animals at Peter Jolly’s Circus
Durée : 03:03

Tant qu’une interdiction n’aura pas été mise en place et que Monaco ne s’engagera pas à faire de son Festival du cirque un événement sans animal, la Principauté continuera à soutenir ces pratiques barbares.

Monsieur le ministre d’Etat, il est grand temps de prendre cette décision et d’interdire cette forme cruelle et désuète de divertissement. Je m’engage à ouvrir une bouteille de Dom Pérignon 1952 ou de Bollinger 1969 avec vous le jour où des mesures concrètes seront prises dans ce sens.