Une hutte des pygmées Baka, en mai 2013. | Aso bolo / (CC BY-SA 3.0)

WWF, le Fonds mondial pour la nature, a-t-il cherché à dissimuler les informations dont il disposait sur la situation des Pygmées Baka aux abords des parcs naturels du sud-est du Cameroun ? C’est ce que laissent à croire les nouvelles révélations de l’ONG Survival International, qui a rendu public, lundi 23 janvier, un rapport interne réalisé par deux experts indépendants à la demande de WWF sur « la mise en œuvre des stratégies et principes du WWF sur les droits de l’homme dans les sites sélectionnés autour des parcs nationaux de Lobéké, Boumba Bek et Nki ».

Ce travail, finalisé en avril 2015, constate les mauvais traitements dont sont régulièrement victimes les Baka qui ont été déplacés de leurs terres pour la création de ces aires protégées et relève de graves entorses au principe de consultation préalable que la grande association de conservation s’est engagée à respecter. En tout, 493 personnes ont été interrogées pour étayer les conclusions.

Survival, dont la plainte contre WWF auprès de l’Organisation de coopération et de développement économiques pour « violation des droits de l’homme » a été jugée recevable fin décembre 2016, affirme ainsi que « WWF savait que les Baka n’avaient pas été consultés. Cependant, l’organisation a maintenu qu’il y avait eu “un haut niveau de consentement”».

Dans le rapport, les deux auteurs mentionnent que « sur le terrain, les Baka ont affirmé qu’ils n’ont pas été consultés et qu’ils ont vu leurs terres transformées en aires protégées sans leur consentement ». Ils font également référence aux « exactions commises par les écogardes, qui sont des agents de l’Etat qui bénéficient de l’appui logistique et financier de la part de WWF ». Les auteurs demandent que des mesures soient « mises en place pour veiller au consentement libre, préalable et informé et à l’application des principes du WWF sur le terrain ».

Violences des écogardes

Ces violences, que l’ONG décrivait comme n’étant pas « une des premières priorités pour la plupart des communautés Baka », semblent au contraire concerner la majorité des communautés, selon le document publié lundi.

Survival met également en cause les affirmations de WWF assurant que les écogardes remplissent leur mission « en donnant accès aux forêts communautaires, y compris celles des Baka ». Le rapport dément cette version en déplorant le refus du droit d’usage de leurs terres qui est infligé aux Baka, dont la subsistance dépend en totalité des ressources forestières.

Enfin, l’organisation des peuples autochtones, basée à Londres, rappelle que malgré ses requêtes, WWF a jusqu’à présent nié l’existence de cet audit indépendant. Dans une interview donnée au site Mongabay en février 2016, Phil Dickie, responsable de la gestion des problèmes au WWF, avait réfuté tout lien entre les accusations de Survival et les consultations menées auprès des Baka.