Devant la cathédrale Saint-Augustin de Yamoussoukro (à 200 km au nord d’Abidjan), la capitale administrative et politique de Côte d’Ivoire, Félicien sort de la messe. « J’ai prié pour que les Eléphants obtiennent la qualification. J’espère que Maman Marie leur accordera cette grâce », affirme-t-il, avant de se rendre au centre-ville.

Habituellement vendeur de journaux, Félicien a garni son kiosque de vuvuzelas, de maillots et d’autres gadgets aux couleurs nationales à la faveur de la Coupe d’Afrique des nations. Il espérait surfer sur un bon parcours de la sélection ivoirienne pour faire des affaires. Mais après une semaine de compétition et surtout deux prestations moyennes des Eléphants (deux matchs nuls contre le Togo et la République démocratique du Congo), il a écoulé très peu de marchandises. C’est dit : les Eléphants, champions de la CAN 2015, n’ont qu’à bien se tenir face aux Lions de l’Atlas mardi soir pour gagner leur place en quarts de finale.

« Le match terne de nos joueurs »

« Juste deux posters de l’équipe vendus sur quinze. J’avais aussi reçu cinq intentions d’achat de maillots [à 4 000 francs CFA l’unité, soit 6 euros] avant le début de compétition. Mais le premier match terne de nos joueurs a fait changer d’avis les clients, constate Félicien, un brin amer. Maintenant, tout dépendra de ce match contre les Marocains. J’aurais investi à perte si l’équipe ne se qualifie pas. »

Dans les restaurants et les maquis des alentours, les affaires ne sont guère meilleures. « Les jours de matchs sont devenus comme des jours ordinaires. Pourtant, nous commandons deux fois plus de casiers de boissons, se désole Caroline, une restauratrice. Pour ce soir, nous allons encore croiser les doigts. Dieu fait que nous ayons la victoire afin que tout se décante ! »

Dans les grandes artères de la ville, où au moins deux soldats avaient été tués à la mi-janvier pendant la mutinerie de l’armée, la mobilisation autour des champions d’Afrique reste assez discrète. Les drapeaux du pays sont très peu hissés et la CAN n’occupe pas forcément tous les esprits. Dans les taxis communaux, les variétés musicales sont préférées aux émissions spéciales consacrées aux Eléphants.

« Personne ne veut trop rêver. Chacun reste prudent. On préfère prendre un pot entre amis et suivre avec désintérêt les matchs. Mais je crois qu’en cas de qualification en quarts de finale, la flamme de la mobilisation va se rallumer toute seule », espère Mathias Ngoran, chauffeur de taxi.