L’équipe de France, qualifiée pour les demi-finales, salue son public à la fin du match contre la Suède, mardi 24 janvier au stade Pierre-Mauroy, Villeneuve d'Ascq (Nord). | PASCAL ROSSIGNOL / REUTERS

En général, lorsqu’ils restent aussi longtemps sur le terrain après un match, c’est parce qu’il s’agit de la finale, et qu’ils viennent de la gagner. Les handballeurs français ne sont pourtant pas encore champions du monde, mais ce mardi 24 janvier, ils n’ont visiblement pas envie de quitter la scène sur laquelle leur représentation vient de s’achever, au cœur du stade Pierre-Mauroy de Villeneuve-d’Ascq (Nord).

Les Bleus sont venus au bout de la Suède (33-30) au terme d’un quart de finale étouffant et au cours duquel on a bien cru que la fête serait gâchée. Elle se révèle encore plus belle quand on a frôlé le ravin. Alors les « Experts » n’en finissent plus de partager leur joie avec les 28 000 veinards entassés dans une moitié de cette arène de la métropole lilloise, terrain de jeu habituel des footballeurs locaux en Ligue 1, et transformé pour l’occasion en un palais des sports comme le handball n’en visite jamais.

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Le nombre exact de spectateurs n’a pas été communiqué, mais ils étaient à peu près aussi nombreux que trois jours plus tôt, dans ce même écrin, lors du huitième de finale remporté par les Bleus face à l’Islande (31-25), où l’on en avait dénombré 28 010 officiellement. De quoi battre un record pour un match de handball en France, ainsi que pour une rencontre d’un championnat du monde – le précédent datait de la finale du Mondial 1999 en Egypte, et encore, au Caire, une bonne partie des 25 000 spectateurs étaient des soldats réquisitionnés pour l’occasion.

Engouement populaire

Le boucan des 10 500 supporteurs du hall XXL de Nantes, théâtre des matchs du premier tour, avait déjà marqué les champions du monde en titre. Le souvenir des deux rencontres disputées au stade Pierre-Mauroy n’est pas près de s’effacer. La France se retrouve dans le dernier carré d’un Mondial pour la onzième fois sur les treize dernières éditions, une belle habitude. Mais ses handballeurs de la cuvée 2017 retiendront surtout l’engouement populaire, pour le coup, inhabituel.

« C’est vraiment l’accueil le plus impressionnant qu’on ait vécu avec l’équipe de France, sourit Luc Abalo, ailier droit et taulier des Bleus depuis 2006, dans les couloirs du stade Pierre-Mauroy. C’est même pas une salle, c’est un stade ! Jouer devant 28 000 personnes, ça nous a donné une énergie un peu particulière. »

Nikola Karabatic, le maître à jouer tricolore, livre, quant à lui, son sentiment au bord du terrain, qu’il a du mal à quitter : « On a envie de profiter de ce stade, de cette ambiance, des 28 000 personnes qui sont venues nous soutenir. C’est juste incroyable. On veut les remercier, c’est pour ça qu’on n’a pas envie de partir. C’est quelque chose de nouveau pour nous, pour le hand, remplir deux fois d’affilée le stade Pierre-Mauroy avec 28 000 personnes, c’est dingue. Des moments comme ça, ça reste inoubliable, peut-être unique dans une carrière. On en profite, c’est magique. »

Magique pour le handball, et particulièrement pour le handball en France, où ce sport ne cesse de gagner du terrain et de nouveaux licenciés depuis l’époque des « Barjots », les premiers handballeurs tricolores sacrés, lors du Mondial 1995. Auparavant, le hand hexagonal était confiné aux gymnases qui sonnent creux, et cantonné à une image de « sport de profs de gym ».

« Le peuple du handball »

Alors dans l’euphorie, au lendemain du huitième de finale victorieux, l’ancien sélectionneur Claude Onesta, désormais manageur général de l’équipe, est sorti de l’ombre dans laquelle il traverse le tournoi pour faire part de son émotion : « Hier, au stade, j’ai eu une pensée pour tous ces vieux collègues, tous ces pionniers, tous ces gens qui ont, à une époque, œuvré dans la pénombre la plus totale et sans le moindre sou pour essayer de faire connaître notre sport, et j’ai vraiment eu de l’émotion, parce que beaucoup ne sont plus là, et je pense qu’ils auraient aimé voir ce qu’on a eu la chance de voir. »

« Ces 28 000, ce n’est pas qu’un record, qui n’est qu’une ligne dans un livre, a-t-il poursuivi. A mon sens, c’est beaucoup plus qu’un record. On parle souvent de la famille du handball, et c’était effectivement un vrai moment de famille, mais on était tellement nombreux que j’ai le sentiment que la famille du handball est devenue le peuple du handball. »

L’équipe de France retourne à Paris, où elle a déjà disputé le match d’ouverture du tournoi face au Brésil, il y a deux semaines, au Palais omnisports de Bercy qu’il faut désormais appeler AccorHotels Arena. Son jardin habituel risque de lui paraître bien étriqué, avec ses tribunes qui ne pourront accueillir « que » 15 700 spectateurs, lors de la demi-finale face à la Slovénie, jeudi 26 janvier.

Le nombre de téléspectateurs, en revanche, devrait exploser. Pour la première fois de leur histoire, les Bleus passeront sur une chaîne grand public dès la demi-finale, et non plus seulement pour la finale comme ils en avaient l’habitude. Ils auront donc les honneurs de TF1 pour la rencontre face à la Slovénie, un choix stratégique pour la première chaîne qui a eu des répercussions jusque sur la primaire de la gauche, dont les acteurs ont, du coup, décidé d’avancer le débat télévisé de l’entre-deux-tours de vingt-quatre heures.