Jusqu’alors, il n’y avait que La Défonce de François Morellet (1990), sculpture parallélépipédique de métal peint, pour signaler que sous l’esplanade de la Défense (Hauts-de-Seine) se cachait l’un des plus grands musées secrets de France, le Centre national des arts plastiques (Cnap). A partir de 2020, cette institution propriétaire de plus de 100 000 œuvres d’art s’installera dans un bâtiment dédié à Pantin (Seine-Saint-Denis) où elle regroupera ses réserves et ses bureaux.

L’annonce a été faite lors de la conférence annuelle du Cnap, mardi 24 janvier 2017. A l’heure actuelle, le Centre est obligé de répartir près de 30 000 oeuvres de ses réserves (peintures, dessins, estampes, sculptures…) sur une multitude de lieux : trois sites à La Défense totalisant environ 4 500 m2 et une grande réserve d’environ 19 000m2 à Saint-Ouen-l’Aumône (Val-d’Oise). Face à la « complexité de l’affaire », l’objectif est d’en faire un « outil cohérent avec ses missions », explique au Monde Yves Robert, directeur du Cnap.

En 2016, sur un budget de 10 millions d’euros, environ deux millions ont été consacrés à l’achat de 339 œuvres signées de 158 artistes.

Le Cnap, qui dépend du ministère de la Culture et de la Communication, n’est pas à proprement parler un musée. Mais il est chargé selon ses statuts de « soutenir et de promouvoir la création artistique dans ses différentes formes d’expression plastique » et le fait notamment via les acquisitions du Fond national d’art contemporain (FNAC). Depuis 1791, cette sorte de « collectionneur public » enrichit ainsi chaque année la collection de l’Etat, portant à 100 000 le nombre de pièces accumulées. En 2016, sur un budget de 10 millions d’euros, environ deux millions ont été consacrés à l’achat de 339 œuvres signées de 158 artistes. Un tiers des œuvres sont stockées dans des réserves, le reste est prêté à des musées, publics ou privés, pour des expositions (temporaires ou permanentes) ou des administrations nationales, aussi bien en France qu’à l’étranger.

La dispersion des sites, difficile à gérer, et la fin du bail des locaux de la Défense, qui arrive à échéance en 2018, expliquent le déménagement. Celui-ci doit aussi donner l’occasion d’insuffler un nouveau souffle à l’établissement. Les 17 millions d’euros nécessaires à l’achat du nouveau bâtiment, situé rue Cartier-Bresson à Pantin, ont déjà été inscrits au projet de loi des finance de 2017 par la ministre de la Culture. Après une réhabilitation, le lieu offrira une superficie de 26 000 m2.« Il fallait rester au plus près de Paris, mais dans Paris c’eût été illusoire » dit Yves Robert. Il souligne que l’institution publique fait appel à un certain nombre de conservateurs, experts et autres professionnels de toute la France, qui passent par Paris ou en région parisienne pour choisir, organiser et diffuser les œuvres du Cnap.

« Un véritable laboratoire » 

A Pantin, le Cnap bénéficiera d’un écosystème en pleine effervescence. Le long du canal de l’Ourq, Pantin s’est renouvelée et abrite de nouveaux acteurs : d’un côté, l’entreprise de luxe Hermès, le Centre national de la danse (CND) et les Magasins généraux, rénovés pour abriter les locaux de l’agence publicitaire BETC, de l’autre, les Grands Moulins où BNP Paribas a pris place, le Pôle des métiers d’art, la maison Chanel et la galerie Thaddaeus Ropac avec ses 2 000 m2 d’exposition. Pour l’ex-ville rouge, l’emménagement du Cnap est un symbole de plus de sa métamorphose : l’ancienne cité ouvrière se rêve en « Brooklyn de Paris ».

Le Cnap, lui, veut profiter du déménagement pour opérer une mutation : il s’agit, selon le directeur, d’en faire « un véritable laboratoire, un lieu de débats et de rencontres » ainsi qu’un « un outil pour les artistes et les chercheurs » qui pourront davantage consulter et explorer les collections, puisque le nouveau bâtiment abritera un centre de ressources et de documentation.