Empêtré dans les affaires visant les emplois présumés fictifs de son épouse, François Fillon a dénoncé mercredi 1er février « un coup d’Etat institutionnel » contre sa candidature à la présidentielle, accusant « la gauche » et « le pouvoir » d’en être à l’origine.

« La crédibilité de ma candidature est remise en cause » par cette affaire, a-t-il dénoncé lors d’une réunion à huis clos à son QG ce campagne à Paris, selon des propos rapportés à l’Agence France-Presse par des participants.

« Cette opération, je vous le dis tout de suite, elle ne vient pas de chez nous, elle ne vient pas de nos rangs. N’écoutez pas ceux qui disent que ce sont nos propres amis qui pour se venger des uns et des autres ont monté cette affaire », a argumenté M. Fillon alors que les députés LR sont en plein désarroi.

Appel à « tenir 15 jours »

M. Fillon a demandé aux parlementaires LR de « tenir 15 jours » derrière lui, estimant que « dans les 15 jours qui viennent, on aura les résultats de cette enquête. On aura les résultats de cette enquête car on est à la veille de l’élection présidentielle », a-t-il dit.

« Et personne ne peut imaginer qu’on prenne en otage jusqu’au dernier moment l’élection présidentielle et le candidat qui a été désigné par près de 4 millions de Français à la sortie de la primaire de la droite et du centre », a-t-il ajouté.

Et de dénoncer :

« Je vis une expérience d’une violence inouïe, ma famille, mon entourage, nous-mêmes, la crédibilité de notre famille politique, de ma candidature, tout est remis en cause, dans le cadre d’une opération organisée professionnelle (...) Je sais que d’autres parmi vous ont déjà vécu des moments comme ceux-là. Je pense à eux. Ca ne m’était jamais arrivé »

Les ténors LR montent au front

Plusieurs ténors du parti ont pris la parole lors de cette réunion des parlementaires, pour prendre la défense du candidat. Ainsi de Jean-Pierre Raffarin qui a lancé, s’adressant à M. Fillon :

« Les Français reconnaîtront ta résistance. Les Français reconnaîtront ta capacité à tenir droit, à tenir debout. Il faut que nous tenions, que nous tenions debout jusqu’au moment du reflux. »
« Si nous étions désunis, nous commettrions une faute lourde car nous remettrions en cause l’alternance. »

Le député Thierry Solère, porte-parole de Fillon, a repris la formule du candidat, estimant à son tour que l’« on assiste à un coup d’Etat institutionnel » :

On cherche à empêcher à la droite française et au centre-droit français (d’avoir) son candidat à l’élection présidentielle. Personne dans notre famille politique n’est dupe de cela. (...) Vous avez vu pour la première fois un homme politique qui, à 90 jours d’une élection présidentielle, est mis en cause pour des faits qu’il assume parfaitement, qui sont légaux. Personne n’empêchera François Fillon d’être présent au premier tour et au deuxième tour de l’élection présidentielle.

Réaction de Stéphane Le Foll

Le porte-parole du gouvernement, Stéphane Le Foll, a immédiatement réagi aux accusations de M. Fillon, les jugeant « pas acceptable(s) ».

« La question qui est posée n’est pas celle d’un coup d’Etat de la gauche », a déclaré M. Le Foll lors du compte rendu du Conseil des ministres. « Chacun doit assumer ses responsabilités, les Français attendent simplement vérité et transparence », a-t-il renchéri.

Dans la tourmente de l’affaire Penelope, François Fillon dégringole dans les intentions de vote

Les intentions de vote en faveur de François Fillon s’effondrent en raison de l’affaire des présumés emplois fictifs de son épouse, selon un sondage Elabe pour Les Echos et Radio Classique publié mercredi 1er février. Cette enquête, rappelons-le, donne une photographie de l’opinion à un instant T, sans préjuger du résultat de l’élection d’avril, et est significative des mouvements de l’opinion face à deux nouvelles actualités : l’affaire Fillon et la victoire de Benoît Hamon au second tour de la primaire de la gauche.

D’après cette enquête, réalisée sur Internet les 30 et 31 janvier auprès d’un échantillon de 1 053 personnes représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus, le candidat de la droite dégringole, au profit de Marine Le Pen et d’Emmanuel Macron, tandis que celui du Parti socialiste, qui était très bas dans les intentions de vote, gagne 10 points.

Au premier tour

  • Marine Le Pen en tête du premier tour devant Emmanuel Macron

La présidente du Front national est donnée en hausse de 3 points par rapport à janvier, avec 26 % à 27 % des intentions de vote des sondés.

  • Emmanuel Macron et François Fillon au coude à coude

Selon les chiffres de l’enquête d’opinion, Emmanuel Macron, fondateur d’En marche !, arriverait deuxième de ce scrutin, récoltant entre 22 % et 23 % des suffrages, quand François Fillon n’en récolterait plus que de 19 % à 20 %, selon que François Bayrou soit candidat, soit cinq à six points de moins qu’en janvier. C’est cette chute qui est intéressante, car si l’on prend en compte la marge d’erreur propre à cette enquête, selon les scénarios, Emmanuel Macron peut se trouver derrière François Fillon à l’issue du premier tour, comme devant lui. Les deux hommes se disputent donc la deuxième place.

Autre donnée intéressante, la chute de M. Fillon s’explique notamment par le fait qu’il ne fédère sur son nom que 56 % à 60 % des électeurs de Nicolas Sarkozy au premier tour de la dernière élection présidentielle, 18 % à 20 % lui préférant Emmanuel Macron, et 14 % Marine Le Pen.

  • Benoît Hamon s’envole

Benoît Hamon, vainqueur de la primaire organisée par le PS, enregistre quant à lui un bond de 10 à 11 points par rapport au début de janvier, à 16-17 %, devançant largement le candidat de La France insoumise, Jean-Luc Mélenchon (10 %, en baisse de 3 à 4,5 points).

Au second tour

Dans l’hypothèse d’un second tour opposant Marine Le Pen à François Fillon, ce dernier l’emporterait avec 59 % des voix.

Si la présidente du Front national était opposée à Emmanuel Macron, le candidat d’En Marche ! l’emporterait avec 65 %. Même si l’on prend en compte la marge d’erreur, dans les deux cas, l’adversaire de Marine Le Pen l’emporterait.