La chancelière allemande, Angela Merkel, et le président turc, Recep Tayyip Erdogan, au palais présidentiel turc, à Ankara, le 2 février 2017. | © UMIT BEKTAS / REUTERS

En visite en Turquie pour la première fois depuis le coup d’état manqué de juillet 2016, Angela Merkel a annoncé jeudi 2 février avoir fait part à Recep Tayyip Erdogan de ses préoccupations sur l’état de la liberté d’expression et de la liberté de la presse en Turquie, lors d’un point de presse conjoint à Ankara.

« Avec le putsch, nous avons vu comment le peuple turc s’était levé pour la démocratie et les règles de la démocratie en Turquie », a déclaré la chancelière. Puis, citant les difficultés rencontrées par des correspondants des médias allemands à obtenir leur carte de presse turque, elle a ajouté :

« C’est exactement pourquoi, dans cette phase décisive, il est important que la liberté d’opinion soit respectée et, en relation avec cela, nous avons discuté de la liberté de la presse. »

Demande de garanties sur la réforme constitutionnelle

Mme Merkel a souligné que « la séparation des pouvoirs et la liberté d’expression d[evai]ent être garanties » dans la révision constitutionnelle voulue par M. Erdogan et soumise à référendum en avril. La chancelière a également estimé que cette consultation populaire devrait être supervisée par une délégation de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE).

De son côté, M. Erdogan a balayé les critiques formulées par des opposants turcs, qui dénoncent une dérive autoritaire et redoutent que, si la réforme est définitivement adoptée, le président puisse intervenir directement dans le fonctionnement de la justice.

« Cela n’a absolument aucun fondement (…) Il y a un organe législatif, l’exécutif est également là, de même que la justice (…). Il n’est pas question de mettre fin à la séparation des pouvoirs. »

Les deux dirigeants ont également parlé du pacte sur les migrants conclu en mars 2016 entre la Turquie et l’UE, de la situation en Syrie et en Irak, ainsi que des relations commerciales, a précisé M. Erdogan.

Le déplacement en Turquie de Mme Merkel, qui doit également rencontrer le premier ministre turc, Binali Yildirim, et des opposants, survient alors que les relations entre Ankara et Berlin se sont sensiblement dégradées depuis le putsch manqué en juillet.

On ignore si le cas de la quarantaine d’officiers turcs de l’Organidation du traité de l’Atlantique nord qui a demandé l’asile politique en Allemagne a été abordé par les deux dirigeants.

Ankara met en garde Athènes

En parallèle de la visite d’Angela Merkel jeudi, les autorités turques ont exprimé leur mécontentement après la décision de la justice grecque la semaine passée de refuser l’extradition de huit militaires soupçonnés d’avoir pris part au coup d’état manqué.

Accusant Athènes de se livrer à des provocations, Ankara a évoqué un « point de non-retour » si les tensions continuaient de s’aggraver. Mercredi, Athènes a signalé des incursions caractérisées d’un avion militaire turc au-dessus de la mer Egée ; ce que le ministre grec de la défense grec, Panos Kammenos, a qualifié de « comportement de cow-boy ».

« Cela fait longtemps que la Grèce fait de la provocation. Nous nous comportons raisonnablement afin qu’il n’y ait pas de tensions avec nos voisins », a affirmé le ministre des affaires étrangères turc, Mevlut Cavusoglu, cité par le quotidien Hurriyet. « Nous savons comment apporter la réponse appropriée. Si la situation se dégrade, ce qu’a Dieu ne plaise, si se produit un incident hasardeux, il n’y aura pas de retour », a-t-il ajouté.