Le président José Eduardo dos Santos, l’un des plus anciens dirigeants africains, a confirmé vendredi 3 février, la fin de son règne sans partage de trente-sept ans sur l’Angola en annonçant qu’il ne briguerait pas de nouveau mandat aux élections générales d’août.

Conformément au scénario qui avait filtré en décembre 2016, c’est un de ses fidèles, l’actuel ministre de la défense, Joao Lourenço, qui a été choisi pour lui succéder.

« Le comité central du MPLA [Mouvement populaire de libération de l’Angola] a approuvé le nom du candidat Joao Lourenço en tête de la liste pour les élections du mois d’août », a déclaré M. dos Santos en ouverture d’une réunion du parti.

Agé de 74 ans, « Zedu », ainsi que le surnomment les Angolais de la rue, a confirmé sa prochaine retraite alors que le pays bruisse de rumeurs sur sa maladie.

Successeur à la réputation de « modéré »

Arrivé au pouvoir en 1979, M. dos Santos était devancé d’un mois seulement, pour le titre de doyen des présidents africains par l’actuel président de Guinée équatoriale, Teodoro Obiang Nguema.

« De nombreux Angolais vont pour la première fois être les spectateurs d’un changement de président, a commenté à l’AFP Alex Vines, du centre de réflexion britannique Chatham House. C’est un tournant décisif dans l’histoire de l’Angola moderne », a ajouté cet expert.

En 2016, M. dos Santos avait une première fois évoqué publiquement sa retraite en affirmant qu’il quitterait le pouvoir en 2018. Et en décembre, des sources internes au parti avaient révélé qu’il ne briguerait pas de nouveau mandat. Mais cette information n’avait pas été confirmée officiellement, ouvrant la porte à toutes les rumeurs. M. dos Santos a longtemps été soupçonné de vouloir promouvoir l’un de ses enfants pour perpétuer son règne sur le pays.

Mais, face à la réticence des cadres du MPLA, il a confirmé vendredi qu’il céderait la place à Joao Lourenço, actuel ministre de la défense et vice-président du parti, qui jouit d’une réputation de « modéré ».

Ce général à la retraite devrait lui succéder à la tête de l’Angola si, selon toute vraisemblance, le parti au pouvoir l’emporte en août.

La Constitution angolaise ne prévoit pas de scrutin présidentiel, mais précise que le poste de chef de l’Etat revient au numéro un du parti qui remporte les législatives.

Ancien guérillero marxiste

Le départ de l’ancien guérillero marxiste ouvre une nouvelle page de l’histoire de l’Angola mais ni ses adversaires, ni les analystes ne s’attendent à de grands bouleversements. « La population va s’apercevoir que personne n’est éternel, mais au niveau politique cela ne va pas changer grand-chose », prédisait récemment le rappeur et opposant Luaty Beirao.

« M. Lourenço a clairement été choisi car il convient à la vieille garde du MPLA et ne piétinera pas l’héritage de dos Santos », a confirmé Benjamin Augé, spécialiste du pays à l’Institut français des relations internationales (IFRI).

S’il s’apprête à céder son mandat de chef de l’Etat, le « camarade président » dos Santos restera un membre influent du parti. « Cela lui permet de continuer à influencer la transition et à protéger son héritage », note Alex Vines.

Le MPLA est arrivé au pouvoir en 1975 lorsque l’Angola a acquis son indépendance du Portugal. M. Ddos Santos a pris les rênes du pays quatre ans plus tard après la mort du chef historique du parti, Agostinho Neto.

Pendant son règne, « Zedu », a imposé son autorité sur l’ensemble du pays, de la justice à l’économie, tout en muselant l’opposition par une répression policière brutale.

« Six mois pour corriger ses erreurs »

« Il lui reste six mois au pouvoir. Nous l’exhortons à en profiter pour corriger ses plus grandes erreurs (…) par exemple réviser les lois et décrets qui limitent la liberté d’expression », a souhaité Zenaida Machado, de l’ONG Human Rights Watch (HRW).

Symbole de sa mainmise sur l’Angola, il a nommé en juin 2016 sa propre fille, Isabel, considérée comme la femme la plus riche d’Afrique, au poste clé de directeur de la Sonangol, la compagnie nationale d’hydrocarbures.

S’il a sorti le pays de la guerre civile (1975-2002), il laisse à son successeur un pays plongé dans une pauvreté extrême et englué dans une crise économique provoquée par la chute des cours du pétrole, dont il est, avec le Nigeria, le premier producteur africain.