Le président russe, Vladimir Poutine, et le premier ministre hongrois, Viktor Orban, au Parlement, à Budapest, le 2 février. | KAROLY ARVAI/AFP

La rencontre entre l’un des rares soutiens européens de Donald Trump et le président russe aurait pu donner lieu à des déclarations fracassantes. Et pourtant non : jeudi 2 février, Vladimir Poutine et Viktor Orban se sont contentés, en conférence de presse, de rappeler leurs positions sur les grands dossiers internationaux.

Le premier ministre hongrois accueillait une nouvelle fois M. Poutine à Budapest. Il a certes encore critiqué ouvertement les sanctions adoptées par les Vingt-Huit à l’encontre de Moscou suite à l’annexion de la Crimée en 2014. Mais il n’a pas annoncé qu’il opposerait son veto à leur renouvellement. Il n’a pas non plus surjoué l’alliance avec Moscou.

L’attention a été principalement portée, lors d’entretiens rapides, à la relance des échanges commerciaux, dont la baisse en trois ans est spectaculaire ici comme dans le reste de l’Union européenne. « Il est triste pour moi de devoir annoncer que, malgré tous nos efforts, la Hongrie a perdu 6,5 milliards de dollars [6 milliards d’euros] en revenus d’exportation », à cause des sanctions, a affirmé M. Orban, qui espère obtenir, grâce à sa relation accommodante avec Moscou, de nouveaux débouchés privilégiés dans certains secteurs de l’économie russe.

M. Orban, comme d’autres dirigeants de la région, rappelle volontiers sa « situation inconfortable ». Membre de l’OTAN, tenue à la solidarité européenne, la Hongrie se doit toujours d’obtenir de la Russie qu’elle lui accorde des garanties sur les livraisons de gaz, dont elle reste ultradépendante.

Pacte faramineux

De son côté, M. Poutine, qui revenait pour la première fois au sein de l’Union européenne depuis une visite effectuée en Slovénie en juillet 2016, s’est déclaré prêt à financer la totalité de la construction des deux nouveaux réacteurs nucléaires de 1 200 mégawatts sur la centrale nucléaire de Paks. Implanté au sud de Budapest, sur le Danube, le site construit dans les années 1970 avec une technologie soviétique fournit déjà plus de 40 % de l’électricité du pays. Le contrat de son agrandissement, signé avec Rosatom en 2014, en pleine crise ukrainienne, prévoit de doubler d’ici à 2023 sa capacité.

C’est un pacte faramineux pour la petite Hongrie, d’un montant estimé à 12 milliards d’euros. Il est couvert à 80 % par des lignes de crédit russes. Les travaux, censés doper la croissance, doivent commencer en 2018, mais ils sont suspendus au feu vert de Bruxelles, qui prend son temps pour vérifier la viabilité d’un dossier qui paraît difficile à boucler sans des aides de l’Etat déguisées.

« La Commission ne semble toujours pas persuadée de la cohérence du modèle économique qui a été présenté », affirme un diplomate occidental.Il ne s’agirait que de « tracasseries gratuites » pour le Kremlin, qui voit en ce projet hongrois une chance inespérée de faire de Rosatom un deuxième outil d’influence géopolitique en Europe centrale avec Gazprom, son autre fleuron énergétique.