Additions subrepticement corsées, publicité mensongère, tarifs inaccessibles, ce sont quelques-unes des mauvaises manières des sites de vente en ligne de billets d’avion qui ont été mises au jour par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF). Ce n’est sans doute pas un hasard si le gendarme de la consommation et des prix a choisi de frapper fort, juste avant les départs pour les vacances scolaires de février. Au terme d’une enquête au long cours, démarrée fin 2015, et au cours de laquelle il a « contrôlé toutes les agences de voyages en ligne », l’organisme public a épinglé, mardi 31 janvier, une vingtaine de sites de vente en ligne. Ils sont notamment pointés du doigt pour leurs « pratiques trompeuses en matière d’affichage des prix des billets ».

L’une des filouteries le plus couramment utilisées par les sites consiste à proposer des billets à des tarifs en pratique « inaccessibles à la plupart des consommateurs ». En effet, signale la DGCCRF, pour en bénéficier, il faut régler son achat avec des cartes de paiement exotiques ou très peu répandues. Outre qu’elle trompe les consommateurs, cette pratique permet aussi aux sites indélicats d’être mieux référencés par les comparateurs de prix sur Internet.

« C’est le moyen de drainer du trafic » sur Internet, de faire du « clic », explique Loïc Tanguy, directeur de cabinet adjoint du gendarme de la consommation et des prix.

Tarifs artificiellement bas

Pour afficher des tarifs artificiellement bas, certains sites se gardent d’indiquer tous les frais supplémentaires. D’autres ne font pas mention des droits auxquels peuvent prétendre les consommateurs en matière de taxes d’aéroport.

Avec ces astuces, à la limite de l’arnaque, ces agences de voyages en ligne peuvent mettre en avant des tarifs « parfois inférieurs de plus de 50 % au prix réel supporté par la quasi-totalité des clients », indique encore le rapport de la DGCCRF. « Ces prix annoncés trompent le consommateur et faussent les résultats des comparateurs et donc la concurrence », estime -t-elle. La direction de Bercy a même constaté des infractions plus graves. Certains sites n’hésitent pas à majorer le prix des billets, à l’insu du consommateur, au moment même ou celui-ci règle son achat en renseignant ses coordonnées de carte bancaire.

15 000 euros d’amendes pour Govoyages

A l’issue de ses investigations, la DGCCRF « a demandé aux sites de se mettre en conformité » avec la réglementation en vigueur. Toutefois, le site Govoyages.fr a été d’ores et déjà « condamné à 15 000 euros d’amendes pour ne pas s’être mis en conformité », signale M. Tanguy. Odigeo, société propriétaire de Govoyages.fr, envisage de former un recours. La DGCCRF a aussi engagé « des suites » à l’encontre de deux autres sites Travelgenio et Travel2be « pour des manquements à l’obligation de loyauté en matière d’affichage de prix ». Ces « pratiques commerciales trompeuses » sont connues depuis longtemps des compagnies aériennes. « Cela provoque des perturbations tarifaires », déplorent-elles. Une concurrence déloyale qui leur a déjà coûté des millions d’euros de manque à gagner. Surtout, dénoncent-elles, la peur du gendarme ne suffit pas à remettre ces sites dans le droit chemin.

« Trois mois après, ils recommencent ou trouvent d’autres pratiques frauduleuses », déplore une compagnie qui souhaite rester anonyme. L’imagination des sites semble sans limite. De nouvelles tromperies ont déjà cours. L’une consiste à « augmenter frauduleusement le prix des excédents de bagages ». Une autre pousse les consommateurs à acquérir d’inutiles et coûteux forfaits annulation ou modification de leurs billets alors que ceux-ci comportent déjà de telles clauses. Toutefois, les compagnies aériennes ne veulent pas partir en guerre contre les sites. « Les agences de voyages en ligne ne sont pas nos ennemies », tempère l’une d’elles. Car elles vendent… beaucoup de billets.