Le ministre-président de Wallonie, le socialiste Paul Magnette, en octobre 2016 | FRANCOIS LENOIR / REUTERS

Le ministre-président de la Wallonie, le socialiste Paul Magnette, a jugé, vendredi 3 février, « souhaitables », « un Polxit, un Hongrexit, un Roumaxit, un Bulgxit » qui suivraient la sortie prochaine du Royaume-Uni de l’Union européenne.

Se définissant comme un « fédéraliste meurtri » et, dit-il, « peut-être le premier des eurosceptiques socialistes », l’ancien dirigeant de l’institut d’études européennes de l’Université libre de Bruxelles a livré un diagnostic ultra-critique sur l’évolution de l’Union à l’occasion du 25e anniversaire du traité de Maastricht, signé aux Pays-Bas le 7 février 1992.

Le ministre-président wallon, qui s’est illustré récemment en s’opposant au CETA, le traité commercial UE-Canada, finalement signé à Bruxelles après que sa région a exigé une renégociation, « espère », dit-il, dans un entretien au quotidien L’Echo, un scénario qui clarifierait l’avenir européen. A savoir, une négociation « dure mais équilibrée » avec Londres qui inspirerait des pays d’Europe centrale et orientale, mais peut-être aussi le Danemark et la Suède, potentiellement tentés, à leur tour, par la négociation d’accords commerciaux, des partenariats, et finalement une sortie de l’Union.

Le propos tranche radicalement avec le discours habituel des sociaux-démocrates européens, et même celui du PS francophone belge. Au cours de l’émission « Internationales » de TV5, Le Monde et RFI, diffusée dimanche 5 février, Rudy Demotte, le ministre-président PS de la Fédération Wallonie-Bruxelles, l’institution qui réunit les francophones de Wallonie et de Bruxelles, a d’ailleurs pris ses distances avec son homologue wallon. Il prône, pour sa part, une relance européenne à partir de quelques pays mais avec la multiplication d’accords de coopération entre les Etats membres plutôt que le départ d’un ou plusieurs d’entre eux.

Une Europe déjà « en train de se désintégrer »

Respecté dans les cercles universitaires et figure montante du PS francophone, il est maire de Charleroi et donné comme possible successeur du président Elio Di Rupo, M. Magnette trace désormais les contours d’une Europe qui est déjà, dit-il, « en train de se désintégrer », avec des pays « qui vont devenir ingouvernables ou gouvernés par des dingues ».

Il juge que l’une des réponses au Brexit, la promesse d’une relance de l’Europe de la défense, est insuffisante. « Sans les Britanniques, l’Europe de la défense, c’est la France » ironise-t-il. Il prône plutôt la conclusion d’accords avec le Maghreb et l’Afrique.

Très critique, aussi, à l’égard de la Commission de Bruxelles, qui s’ingère « dans des matières nationales extrêmement sensibles » mais s’avère incapable de s’en prendre à la fraude fiscale ou de gérer la question des réfugiés, M. Magnette en fait le symbole des « élites complètement déconnectées du monde ». Il s’en prend toutefois également à son compatriote Guy Verhofstadt, ex-premier ministre du royaume et actuel président du groupe des libéraux et démocrates à Strasbourg. M. Verhofstadt, qui prône la construction d’un espace politique européen et d’une circonscription électorale fédérale, est accusé de mettre « tout à l’envers » ce qui est, selon le responsable wallon, « typique » des gens qui ne comprennent pas la société actuelle. « Dire que l’on va changer les institutions pour changer le monde, ça ne marche pas ».

M. Magnette, qui n’a pas caché ses ambitions de jouer, un jour, un rôle au plan européen, définit en tout cas son propre programme. La fin de la dérégulation sociale et fiscale qu’a entraînée l’euro, en vertu de la logique monétariste de l’Allemagne, à laquelle les responsables des institutions bruxelloises n’ont pas su résister. L’arrêt de toutes les négociations des traités multilatéraux ou bilatéraux, au profit d’accords commerciaux « purs ». Un effort massif pour des programmes visant à assurer l’indépendance énergétique et la lutte contre le réchauffement climatique, la mutualisation d’une partie des dettes nationales et un vaste plan d’investissements, « un plan Juncker puissance 100 ».