Les employeurs incités à dénoncer la mauvaise conduite de leurs salariés
Les employeurs incités à dénoncer la mauvaise conduite de leurs salariés
LE MONDE ECONOMIE
Question de droit social. Pour certaines infractions, les employeurs sont désormais menacés de sanction s’ils ne dénoncent pas un conducteur-salarié.
French gendarme looks through a new binocular speed radar at a speed-trap on the Paris/Bordeaux motorway near Saint Jean d'Angely, southwestern France, on April 30, 2008. | © Regis Duvignau / Reuters / REUTERS
Lorsqu’un salarié commet un excès de vitesse et est « flashé » au volant du véhicule dont la carte grise est établie au nom de l’entreprise, c’est l’employeur qui est débiteur de l’amende. Jusqu’à présent, il pouvait soit payer l’amende avec le risque de déresponsabiliser le conducteur qui conservait ses points, soit contester l’infraction, exercer une requête en exonération, voire dénoncer l’auteur de l’infraction. En pratique, peu d’employeurs dénonçaient les salariés en infraction qui ne subissaient ainsi aucun retrait de points.
Pour renforcer la politique sécuritaire et l’égalité de tous devant la loi, la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle oblige les chefs d’entreprise à signaler l’identité du conducteur du véhicule d’entreprise en infraction (C. route, art. L121-6). A défaut, la peine d’amende prévue pour les contraventions de 4 ème classe (une somme forfaitaire de 135€, pouvant être minorée ou majorée, et associée à une perte de 1 à 6 points sur le permis de conduire) est encourue en plus de l’amende initiale.
Les infractions concernées
Quelles infractions sont concernées par ces dispositions entrées en vigueur le 1er janvier? La loi vise les infractions commises avec un véhicule de l’entreprise (véhicule dont l’entreprise est propriétaire ou qu’elle loue) et relevées au moyen d’un appareil de contrôle automatique homologué (radars, vidéo-protection). Semble donc exclues les infractions constatées directement par les forces de l’ordre, par exemple le stationnement interdit.
La liste des infractions routières identifiables par ces moyens est longue : de l’excès de vitesse, non respect des distances de sécurité, circulation sur les bandes d’arrêt d’urgence, à l’usage du téléphone tenu en main (C. route, art. R. 130-11). Pour toutes ces infractions, l’employeur doit signaler l’identité du salarié qui en est l’auteur.
Pour ce faire, le représentant légal de la société dispose d’un délai de quanrante-cinq jours, à compter de l’envoi ou de la remise de l’avis de contravention, pour signaler aux autorités, l’identité, l’adresse du collaborateur qui conduisait le véhicule, et la référence du permis de conduire.
Il procède par lettre recommandée avec accusé de réception en utilisant le formulaire joint à la contravention ou de façon dématérialisée, via le site www.antai.fr (C. route art. A 121-1).
Rares exonérations
Encore faut-il que l’auteur de l’infraction puisse être formellement identifié, ce qui n’est pas toujours aisé, en particulier lorsque le véhicule est utilisé par plusieurs salariés. Dans ce cas, il est souhaitable de mettre en place un registre d’emprunt, permettant de suivre les utilisateurs du véhicule de la flotte de l’entreprise.
Les rares cas d’exonération admis par la loi sont l’existence d’un vol, d’une usurpation de plaque d’immatriculation ou « de tout autre événement de force majeure » (C. route art. L. 121-6).
A n’en pas douter, les juridictions pénales seront saisies pour éclaircir ces points. En tout état de cause, cette réforme doit encourager les chefs d’entreprise à renforcer leur politique de gestion de flotte et de prévention routière.
Charlotte Michaud, avocat associé (www.flichygrange.com).