Alexandre de Moraes (à gauche) avec le président Michel Temer, à  Brasilia le 3 février. | ANDRESSA ANHOLETE / AFP

Jusqu’ici la presse brésilienne commentait surtout les maladresses accumulées par le ministre de la justice, considéré par le magazine Epoca comme « une erreur de casting » du gouvernement de Michel Temer. Depuis lundi 6 février, le ton est devenu plus grave envers Alexandre de Moraes, spécialiste de droit constitutionnel, décrit comme truculent et autoritaire, proposé ce jour-là, par le chef d’Etat au poste de juge de la Cour suprême. Que le quadragénaire soit soupçonné d’avoir, en 2004, devant des étudiants de droit de l’université de Sao Paulo (USP) justifié l’usage de la torture, n’est pas le principal motif d’indignation. Une partie de l’intelligentsia brésilienne se choque du profil politique de l’avocat.

Une pétition est lancée

La nomination de M. de Moraes, qui doit être confirmée après une audition devant les sénateurs, fait suite au décès du juge Teori Zavascki dans un crash aérien, le 19 janvier. Le défunt, loué pour son indépendance, était en charge du volet politique de l’opération Lava-Jato (Lavage express), l’enquête qui a mis au jour le plus grand scandale de corruption de l’histoire du pays : l’affaire Petrobras, impliquant cols blancs et caciques politiques de tout bord. Le président Temer, lui-même, a été cité dans des témoignages de prévenus.

S’il est confirmé, M. de Moraes n’héritera pas de tous les dossiers de M. Zavascki mais il sera le relecteur et correcteur du rapport de Lava-Jato. Membre du Parti de la social-démocratie brésilienne (PSDB) éclaboussé par le scandale, il est considéré comme un proche de M. Temer. Il a été l’avocat d’Eduardo Cunha, ex-président de la Chambre des députés en détention provisoire pour corruption. « Un de ceux qui peut être suspecté de défendre Michel Temer et ses soldats », écrit Luis Nassif, commentateur politique sur son blog. « Le soupçon est là et malmène les institutions démocratiques », estime le politologue Carlos Melo. Une pétition, lancée par une association d’étudiants de l’USP, réclame l’abrogation de cette nomination. Mercredi soir, il y avait plus de 200 000 signatures.