Depuis l’élection de Donald Trump, Justin Trudeau a évité de s’engager sur le terrain d’une confrontation marquée avec son nouveau partenaire. | SAUL LOEB / AFP

Donald Trump a accueilli, lundi 13 février, Justin Trudeau à la Maison Blanche. La rencontre est délicate pour le premier ministre canadien, qui espère esquisser un compromis sur le libre-échange mais aussi faire entendre sa différence sur des sujets comme le climat ou l’immigration.

Troisième dirigeant étranger reçu par le nouveau président républicain, après la Britannique Theresa May et le Japonais Shinzo Abe, M. Trudeau a promis de parler à la fois avec « franchise et respect » au président américain.

Les deux hommes ont échangé une poignée de mains à l’arrivée de M. Trudeau à la Maison Blanche puis se sont retirés pour une rencontre privée, avant d’être rejoints par leurs collaborateurs. Lors de leur conférence de presse commune, les deux hommes ont pris soin de marquer les éléments qui les rapprochent : « Aucun pays n’a de relation plus large ni plus profonde que le Canada et les Etats-Unis. »

Depuis l’élection de Donald Trump, Justin Trudeau, qui entretenait une relation étroite avec son prédécesseur, Barack Obama, a évité de s’engager sur le terrain d’une confrontation marquée avec son nouveau partenaire, mais a très tôt marqué sa différence.

Différences sur l’immigration

Peu après que Trump a signé le 27 janvier son décret interdisant provisoirement l’entrée sur le territoire des Etats-Unis de ressortissants de sept pays majoritairement musulmans du Moyen-Orient et d’Afrique, il a annoncé sur Twitter que le Canada accueillerait « ceux qui fuient la persécution, la terreur et la guerre (...) indépendamment de (leur) foi ».

Lors de leur conférence de presse commune, le premier ministre canadien a promis de poursuivre la politique d’ouverture sur les réfugiés. Rappelant que le Canada avait accueilli près de 40 000 réfugiés syriens l’année écoulée, M. Trudeau a estimé que cette politique était compatible avec sa volonté de ne faire aucun compromis sur la sécurité.

Mais au cours de cette rencontre, le président américain a défendu sa politique « de bon sens » sur l’immigration. « Nous ne pouvons pas laisser les mauvaises personnes entrer (...) Les citoyens de notre pays veulent cela », a-t-il fait savoir.

L’Alena en question

Les entretiens ont également porté sur le commerce, alors que Trump a promis de renégocier l’Alena entré en vigueur en 1994 entre les Etats-Unis, le Canada et le Mexique. Mais au cours de cette conférence de presse lundi, le président américain a salué « les relations commerciales exceptionnelles avec le Canada  », évoquant la nécessité de simples « ajustements ».

La volonté de Trump – même s’il vise publiquement le Mexique – de revoir les termes de l’Alena préoccupe toujours les dirigeants du Canada, dont 75 % des exportations sont absorbées par les Etats-Unis ; le Canada est la première destination à l’export de 35 Etats américains. La renégociation de l’accord s’annonce délicate.

Jugeant que l’Alena, accord vieux de 23 ans, était une « catastrophe » pour les Etats-Unis et « très injuste » pour le travailleur américain, Donald Trump a jusqu’ici été nettement plus virulent sur le Mexique que sur le Canada. Lundi, il a ainsi jugé que la situation avec le Canada « est beaucoup moins grave que ce qui se passe à la frontière sud », avec le Mexique. Fervent partisan du libre-échange, M. Trudeau avait, pendant la campagne électorale américaine, mis en garde contre la tentation du « repli » et du « protectionnisme ».

Accord sur Keystone XL

Les deux hommes sont, en revanche, à l’unisson sur le projet de gigantesque oléoduc Keystone XL reliant le Canada aux Etats-Unis. En 2015, le président Obama avait enterré ce projet de construction.

Mais le 24 janvier, le locataire de la Maison Blanche a choisi de donner une seconde vie à l’oléoduc devant relier les sables bitumineux de l’Alberta au sud des Etats-Unis. A Ottawa, on se réjouit de la décision de Washington. « Je suis en faveur de ce projet d’oléoduc, parce que cela va amener de bons emplois pour les Albertains, de la croissance économique », s’était justifié le premier ministre canadien.