Le campus de Rio de Janeiro, le 30 juin. | RICARDO MORAES / REUTERS

C’est l’une des mesures les plus ­marquantes des « années Dilma ». En 2012, le Brésil a voté une loi qui impose des quotas à ses 63 universités ­fédérales, afin de diversifier les origines des élèves.

Désormais, la moitié des places sont réservées aux étudiants ayant suivi leur scolarité dans le système public, tandis que la part de Noirs, métis et Indiens doit correspondre au minimum à celle constatée par le recensement (de l’Etat où est située l’université). Des quotas ont aussi été instaurés dans plusieurs concours de l’administration : par exemple, 20 % des places de l’école de la ­magistrature sont attribuées sur ­critères raciaux.

« Les études montrent que ces élèves ne sont pas moins bons que les autres, qu’ils n’ont pas abandonné en cours de route »

Une vraie révolution. Car, au Brésil, les universités fédérales, gratuites mais sélectives, étaient avant tout la chasse gardée de l’élite blanche, ­héritage d’une société longtemps marquée par l’esclavage. L’effet, aussi, d’un enseignement ­secondaire public de faible ­niveau, qui figure en bas de classement des enquêtes PISA, et qui est largement évité par la classe aisée. Ainsi, en 2011, les Noirs et métis ne ­représentaient que 20 % des étudiants du supérieur, alors qu’ils constituent la moitié de la population. Dix ans auparavant, ils étaient moitié moins.

« Réguler le système »

L’instauration de quotas a rapidement produit son effet. La ­sociologie des campus a été bouleversée. Ainsi, entre 2013 et 2015, 150 000 étudiants noirs ou métis, selon le ministère de l’éducation – au Brésil, la ­couleur de peau doit être renseignée dans les formulaires d’inscription –, sont entrés à l’université.

Ce ­processus continue de générer des tensions

Beaucoup de ces jeunes sont des étudiants de première génération. « Au début, il y a eu des critiques très violentes. Beaucoup pensaient que ces quotas allaient déclencher une guerre raciale, faire baisser le niveau, qu’on voulait importer une politique américaine Les études montrent que ces élèves ne sont pas moins bons que les autres, qu’ils n’ont pas abandonné en cours de route. Les quotas me ­semblent la seule manière de réguler le système, en attendant qu’il se régule de lui-même », estime Dione Moura, professeure à l’Université nationale de Brasilia, établissement pionnier qui a mis en place des quotas dès 2004, avec une poignée d’autres universités.

Toutefois, même si le climat est un peu plus apaisé aujourd’hui, ce ­processus continue de générer des tensions. Notamment parce qu’il crée une plus forte pression à l’entrée pour ceux qui veulent intégrer une université fédérale « hors quotas », alors que le nombre de candidats n’a jamais été aussi élevé.

D’autres polémiques défraient ­régulièrement la chronique, pour ­dénoncer l’admission d’étudiants qui, selon ceux qui s’en plaignent, ­se déclarent à tort noir ou métis pour bénéficier d’un ­système d’admission favorable. Au détriment d’autres ­étudiants. Un débat glissant.