Incidents en marge du rassemblement à Bobigny samedi 11 février. | HERVE LEQUEUX / « LE MONDE »

Des charbons ardents. Depuis le début des événements d’Aulnay-sous-Bois, il y a plus d’une semaine, François Hollande et Bernard Cazeneuve, en lien avec le ministre de l’intérieur, Bruno Le Roux, s’emploient consciencieusement à déminer une situation hautement inflammable, alors que le souvenir des émeutes de 2005 hante l’exécutif et que la campagne électorale attise les risques de polémiques.

Ce week-end, les forces de l’ordre ont encore interpellé 37 personnes dans la nuit de samedi à dimanche, à la suite de nouvelles violences ayant éclaté à Bobigny (Seine-Saint-Denis) en marge d’une manifestation de soutien à Théo L., blessé lors d’une interpellation musclée le 2 février à Aulnay-sous-Bois, toujours en Seine-Saint-Denis, et dont la diffusion des images a déclenché plusieurs nuits de tension dans ce département, mais aussi dans d’autres villes françaises. « Rien ne justifie la violence et la casse », insiste un conseiller de l’Elysée, selon lequel l’exécutif suit la situation « très attentivement ».

Mais ces nouvelles violences – qui ont fait de lourds dégâts à Bobigny – ont donné lieu à une polémique dimanche 12 février. De La Réunion, où il tentait de relancer sa campagne enlisée dans le « Penelopegate », le candidat Les Républicains à la présidentielle, François Fillon, a pointé dimanche « la responsabilité du gouvernement » dans les violences survenues au cours du week-end, s’étonnant du « silence » du ministre de l’intérieur.

De son côté, la candidate Front national, Marine Le Pen, a jugé que les incidents étaient « la conséquence du laxisme qui diffuse dans la société française » et dont les « politiques qui nous ont gouvernés pendant des années » seraient responsables. Proche de François Hollande, le conseiller régional d’Ile-de-France Julien Dray (PS) a tenté de nuancer, en pointant « l’instrumentalisation de ces situations (…) sur le terrain, par des groupes qui sont extrêmement radicaux et qui poussent à la confrontation ».

Mais en pleine campagne présidentielle, l’exécutif danse sur un volcan. Soucieux de jouer l’apaisement et d’éviter que l’affaire Théo L. et ses conséquences (violences urbaines) s’enveniment et prennent un tour politique, François Hollande et Bernard Cazeneuve ont l’intention de rester « mobilisés » sur le sujet dans les prochains jours, selon un conseiller. Le chef de l’Etat, qui s’était déplacé au chevet de Théo L. le 7 février, se rendra ainsi à Aubervilliers (Seine-Saint-Denis) mardi 14 février pour évoquer la question de l’emploi des jeunes dans les quartiers.

M. Hollande, qui rappellera l’action du gouvernement en la matière (la garantie jeunes, notamment), devrait en profiter pour évoquer une nouvelle fois « l’affaire Théo » et la nécessité de « laisser la justice faire son travail ». En déplacement au tribunal de Pontoise, en début de semaine dernière, il avait déjà rappelé que la justice était « garante des libertés ».

Déplacements sur le terrain

Le chef de l’Etat enverra de nouveaux messages à l’intention des jeunes de banlieue jeudi 16 février, à l’occasion d’un déplacement à Rennes dans des quartiers concernés par la politique de la ville. « Plus que jamais, le président pense qu’il faut aller sur le terrain à leur rencontre, déclare-t-on dans son entourage. Car même si beaucoup a été fait, beaucoup reste à faire. »

Soucieux d’équilibrer ses paroles et ses gestes, M. Hollande verra également des policiers vendredi 17 février à Chartres et à Dreux (Eure-et-Loir), lors d’un déplacement consacré à la sécurité. De son côté, le premier ministre, Bernard Cazeneuve – qui avait plaidé mardi pour « la plus grande fermeté » contre les forces de l’ordre qui se rendraient coupables de « manquements graves » –, devait recevoir lundi 13 février à Matignon des associations antiracistes, alors que la secrétaire d’Etat aux victimes, Juliette Méadel, avait évoqué la possibilité d’un acte à caractère raciste en commentant l’affaire.

Le chef du gouvernement devrait notamment évoquer avec ces responsables associatifs les annonces faites en fin de semaine par le ministre de l’intérieur, Bruno Le Roux, qui a souhaité que le déclenchement de la caméra piéton (dont sont équipés des policiers et des gendarmes) devienne obligatoire lors des contrôles d’identité. Un dispositif censé prévenir tout dérapage. M. Le Roux a annoncé un prochain déploiement de 2 600 caméras mobiles mais redit son opposition à la mise en place d’un système de récépissé. « L’objectif, c’est d’apaiser », a résumé la semaine dernière le porte-parole du gouvernement, Stéphane Le Foll.