CETA : que représente le vote ?
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Le premier ministre canadien, Justin Trudeau, a fait le déplacement jusqu’à Strasbourg, mercredi 15 février, pour assister à l’approbation par le Parlement européen de l’Accord économique et commercial global (AECG, CETA en anglais) alors que le même jour le texte a été déposé au Sénat canadien pour accord final. M. Trudeau s’est réjoui du vote des députés européens en faveur de ce traité qui devrait, selon lui, profiter « à la classe moyenne des deux côtés de l’Atlantique ». Le premier ministre libéral devait, en outre, tenir un discours dans l’hémicycle, ce jeudi 16 février – une première pour un chef de gouvernement canadien.

Dans les milieux d’affaires canadiens, l’AECG suscite beaucoup d’espoirs. « Nos entreprises vont pouvoir espérer toucher plus facilement un marché de 500 millions de consommateurs potentiels », explique Martine Hébert, vice-présidente de la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI).

Actuellement, les exportations canadiennes à destination de l’Union européenne (UE) représentent environ 45 milliards de dollars canadiens (32,5 milliards d’euros). « Nos échanges commerciaux s’élèvent au total à 101 milliards de dollars », note Hendrik Brakel, directeur principal à la Chambre du commerce du Canada. L’UE est de ce fait le deuxième partenaire commercial du Canada, derrière les Etats-Unis.

Grâce à l’AECG, ces échanges devraient s’accroître de 20 % à 25 %. Une étude menée conjointement par le Canada et l’UE, sur laquelle les deux parties se sont appuyées pour lancer les négociations en 2009, estime ainsi que les revenus du Canada devraient augmenter de 12 milliards de dollars par année. L’étude souligne aussi que 80 000 nouveaux emplois pourraient être créés dans le pays et que le revenu annuel du ménage canadien moyen pourrait, lui, augmenter de 1 000 dollars. « Cet accord est un vrai succès qu’il faut opposer à la mort du Partenariat transpacifique, affirme M. Brakel. L’AECG vient rassurer les exportateurs canadiens alors que l’incertitude règne toujours en ce qui concerne l’Alena. »

Mobilité facilitée

Plusieurs secteurs canadiens devraient profiter de cette entente, notamment l’aérospatial, la machinerie, le textile, les services financiers, mais aussi l’automobile. « Les constructeurs devraient exporter douze fois plus de véhicules », prévoit Mme Hébert. « Les exportations vont bien sûr augmenter. Mais il faut aussi prendre en compte les revenus des filiales d’entreprises canadiennes en Europe, qui étaient d’environ 90 milliards de dollars ces dernières années », complète M. Brakel.

Enfin, la mobilité facilitée des travailleurs constitue un autre élément de satisfaction pour les chefs d’entreprise canadienne. Ainsi, un contractuel ou un professionnel indépendant pourra séjourner dans le pays de l’autre partie pendant douze mois, au lieu des six actuels.

Un secteur aborde néanmoins cet accord avec une certaine appréhension : l’agriculture. « L’AECG nous promet des gains potentiels mais nous assure des pertes réelles », assène Marcel Groleau, président général de l’Union des producteurs agricoles (UPA). Ce dernier regrette que des contraintes réglementaires européennes demeurent et entravent les exportations de produits canadiens, notamment en ce qui concerne le bœuf aux hormones ou bien encore les céréales génétiquement modifiés (OGM).

Sur le papier pourtant, les agriculteurs et éleveurs canadiens vont pouvoir vendre davantage leurs produits de l’autre côté de l’océan. Ainsi, onze fois plus de produits du bœuf pourront être exportés vers l’Europe, passant de 4 000 tonnes à près de 46 000 tonnes. Le Canada pourra aussi vendre treize fois plus de produits du porc vers l’Europe, pour un total de 75 000 tonnes. L’exportation canadienne de blé sera portée à 100 000 tonnes, et celle de maïs, à 8 000 tonnes.

Les producteurs laitiers font particulièrement grise mine : les importations de fromages européens libres de tarifs douaniers passeront de 13 500 tonnes à 32 000 tonnes par année. Et entraînerait une perte permanente de 2 % du marché pour les producteurs canadiens. Mais ce traité « demeure une entente importante », affirme M. Groleau qui souligne que le Canada est le premier pays à reconnaître à l’UE ses appellations géographiques.