Le logo de TF1. | LIONEL BONAVENTURE / AFP

TF1 se relance mais reste sous pression : le chiffre d’affaires 2016 a certes progressé de 2,9 %, à 2 milliards d’euros, mais les recettes publicitaires des chaînes gratuites ont baissé de 1 %, selon les résultats publiés jeudi 16 février. Surtout, le résultat opérationnel a chuté à un niveau très bas : 45,7 millions d’euros, contre 141 millions l’année précédente. Le groupe précisant toutefois qu’en 2016 ont pesé 83,7 millions d’euros de charges « non courantes ». Le taux de marge opérationnelle est en retrait de 1,6 point, à 6,3 %.

On peut voir là l’histoire d’un média traditionnel dont le modèle est profondément remis en cause par la fragmentation des médias et la fuite de la publicité vers le Web. Pourtant, TF1 pense pouvoir rebondir et vise un « taux de marge opérationnelle courante à deux chiffres en 2019 », ce qui ne s’est pas « pas vu depuis 2007 », a lancé Gilles Pélisson, jeudi, presque un an jour pour jour après sa prise de fonctions de PDG, le 19 février 2016.

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« Notre stratégie est multichaîne, multimédia et multimétier », a martelé M. Pélisson. Au-delà du slogan, il s’agit de compenser le recul de l’audience de la chaîne TF1 à un niveau historiquement bas en 2016, à 20,4 % (– 1 point sur un an). Depuis septembre 2016, le groupe a donc repositionné et relancé ses chaînes de la TNT : TMC (info divertissement pour les 25-49 ans CSP +), NT1 (divertissement et téléréalité pour les 15-35 ans), HD1 (fiction pour les femmes de 35-50 ans) et LCI (info en continu pour les 25-49 ans CSP +). Au total, le bouquet permet de stabiliser l’audience sur les « femmes, responsables principales des achats du foyer » (FRDA), voire de l’augmenter, sur le dernier trimestre 2016.

Tranches stratégiques

Sur la chaîne TF1, le groupe veut « concentrer » ses investissements sur les tranches stratégiques (12-14 heures et 19-23 heures). Le navire amiral doit rester capable de générer de très fortes audiences à certains moments, pour défendre son « power ratio », nom donné au surcoût facturé aux annonceurs en raison de la position de leader de la chaîne, argumente-t-on.

Sur la TNT, TF1 veut combattre la tendance à vendre la publicité « au kilo », en montant en gamme, a expliqué Régis Ravanas, le patron de la régie. Un défi, car il y a encore sur la TNT des invendus publicitaires.

En complément, TF1 doit aussi tenter de se renforcer sur le numérique pour résister à Facebook ou Google. Le premier levier est le replay : en hausse de 15 % en 2016, les vidéos vues à la demande représentent 10 % à 20 % d’audience supplémentaire par rapport à l’antenne. Pour accroître de 15 % son inventaire en ligne, TF1 veut négocier plus de droits pour pouvoir présenter tous les épisodes passés d’une série. Mais aussi insérer des publicités à de nouveaux emplacements (en milieu de programme notamment) ou encore pratiquer « l’adswitching » pour pouvoir vendre en ligne les publicités incluses dans le flux de l’antenne classique.

« Remonter la chaîne de valeur »

Autre chantier d’ampleur sur le Web : le « ciblage » publicitaire pour collecter plus de données sur les spectateurs. TF1 va ainsi les obliger à s’authentifier pour voir une vidéo en ligne, à partir d’avril. Et espère à terme imposer les publicités ciblées à l’antenne.

Après des années de frilosité, TF1 a aussi pris pied dans l’univers des plates-formes Web : il détient désormais 6 % du réseau international de chaînes YouTube Studio71 et sera son opérateur en France, via le réseau Finder dont il détiendra 51 % « d’ici un an ». Sur Facebook, TF1 a racheté en 2016 MinuteBuzz, pour pouvoir proposer à ses annonceurs de leur créer du contenu en ligne, ou « brand content ».

En parallèle, TF1 n’en finit pas de faire des économies : 25 à 30 millions d’euros récurrents en 2016 et autant promis en 2017. Le groupe espère aussi faire plier les opérateurs télécoms et à l’avenir leur faire payer la diffusion de ses chaînes, gratuite jusqu’ici. TF1 est prêt à « aller jusqu’au bout » et à couper le signal, a assuré M. Ravanas.

Côté achats, TF1 veut aussi économiser. Il accorde ainsi moins d’importance qu’avant aux séries américaines de prime time, un genre qui se tarit : avec les studios américains, il veut donc cesser les accords-cadres et acheter au cas par cas.

Enfin, le groupe cherche à « remonter la chaîne de valeur » en s’investissant davantage dans la production. Il a renégocié ses accords avec les producteurs pour pouvoir davantage fabriquer en interne. Et racheté le groupe Newen, ce qui a contribué à la hausse de 46,5 % de l’activité de production du groupe TF1. Un de ses espoirs pour rentabiliser les fictions est de faire des coproductions internationales comme Versailles ou comme les futures séries « américaines » nées du partenariat noué par TF1 avec l’allemand RTL et NBCUniversal.

« Certains de ces actes peuvent paraître petits mais il faut commencer petit puis accélérer », a philosophé en conclusion M. Pélisson.