La commissaire européenne au commerce, Cecilia Malmström, en novembre 2016 à Bruxelles. | THIERRY CHARLIER / AFP

Bruxelles a bien l’intention de profiter de la remise en cause annoncée de l’Accord de libre-échange nord-américain (Alena) par les Etats-Unis. La commissaire européenne au commerce, Cecilia Malmström, a confirmé dès le 1er février sa volonté d’« accélérer les discussions commerciales » avec Mexico.

« Nous assistons ensemble à une montée inquiétante du protectionnisme à travers le monde », a-t-elle affirmé dans un communiqué commun avec le ministre mexicain de l’économie Ildefonso Guajardo. Les deux responsables ont décidé d’« accélérer le rythme de (leurs) pourparlers afin d’en récolter les bénéfices plus tôt ». « Il s’agit d’une de nos priorités cette année », ajoute-t-on à Bruxelles.

En charge de la négociation des traités de libre-échange pour le compte des 28 pays de l’Union européenne (UE), la Commission n’a pas attendu le virage politico-diplomatique américain pour prendre langue avec les Mexicains. Elle avait obtenu en mai 2016 un mandat officiel du Conseil européen (la réunion des Etats membres) pour relancer les discussions en vue de la modernisation d’un accord commercial datant de la fin des années 1990, qui instaurait à l’époque une suppression progressive des droits de douane avec le Mexique.

Selon des chiffres européens datant de mi-2016, l’UE est actuellement le troisième partenaire commercial du Mexique (8 % de son commerce extérieur), après les Etats-Unis (67 %) et la Chine (9 %), tandis que le Mexique est le quinzième partenaire commercial de l’Union. Renforcer les liens entre les deux parties permettrait à Mexico de diminuer un peu sa dépendance vis-à-vis des Etats-Unis.

Intérêts défensifs

De son côté, Bruxelles multiplie les pourparlers bilatéraux en Asie (Philippines, Indonésie, Japon, Singapour, etc.), et en Amérique (Canada bien sûr, mais aussi Mercosur), dans l’espoir qu’ils ramènent quelques points de croissance à une économie européenne qui manque de peps. Deux « rounds » de négociation ont déjà eu lieu entre Mexico et Bruxelles et un troisième est prévu pour avril. Les Européens espèrent obtenir un meilleur accès aux marchés publics et au marché mexicain des services (télécoms, services juridiques, etc.) et visent une reconnaissance large de leurs indications géographiques protégées.

En parallèle, l’UE doit également veiller à ses intérêts défensifs s’agissant de certains produits agricoles sensibles, notamment le sucre, le Mexique étant un énorme producteur. Elle veut aussi en profiter pour imposer aux Mexicains le système des tribunaux d’arbitrage, qu’elle a négocié dans le cadre du CETA. Destiné à trancher les différends entre Etats et multinationales, ce système est censé être plus transparent et indépendant que les instances actuelles.

Mais entre ce que Bruxelles veut et ce qui peut effectivement être ratifié par l’ensemble des 28, il y a une marge. Comme le CETA avant lui, l’accord entre l’UE et le Mexique modernisé, s’il finit par être bouclé (d’ici à quelques années), devra décrocher le feu vert des Parlements de tous les pays de l’Union avant de pouvoir entrer pleinement en vigueur. Or le libre-échange fait de moins en moins vibrer les opinions publiques européennes…