• Galerie Tornabuoni

Les œuvres les plus connues d’Alighiero Boetti (1940-1994) sont les planisphères qu’il faisait broder en Afghanistan, où il vécut un temps, et au Pakistan. Les artisans interprétaient les formes et les couleurs des schémas qu’il leur proposait, ne respectaient qu’à demi la géographie et ajoutaient parfois des commentaires de leur cru aux marges des cartes. Il y en a plusieurs, de grandes dimensions et délicieusement chamarrées, dans cette exposition de grande ampleur. Comme celle-ci se veut une rétrospective en pointillé, s’ajoutent aux cartes d’autres œuvres très différentes en apparence qui rappellent avec quelle grâce Boetti introduisait trouble et absurdité dans les codes et systèmes les plus rigoureusement définis. Ces exercices de désorientation vont de sa poétique et inutile classification des fleuves par leur longueur à des alphabets en ordre dispersé, tracés au stylo à bille pour les uns, brodés pour d’autres. Mais l’œuvre la plus remarquable, parce que la moins connue, de cet hommage est le « muro » que l’artiste composa vingt ans durant en juxtaposant dessins, écrits, coupures de presse et images variées : une chronique, ses archives, un autoportrait en pièces détachées. Philippe Dagen

« Alighiero Boetti ». Galerie Tornabuoni Art, passage de Retz, 9, rue Charlot, Paris 3e. Du lundi au samedi de 10 h 30 à 18 h 30. Jusqu’au 8 avril. tornabuoniart.fr

  • Galerie Suzanne Tarasiève

Les Suisses sont décidément les rois de l’abstraction dans sa tendance la plus froide, cela se confirme encore une fois avec Pierre Schwerzmann et ses toiles illusionnistes. Jeux de fausses transparences et de vrais reflets, pièges optiques qui font peser le plus grand doute sur la surface même du tableau… Dans le sillage de la tradition cinétique, l’artiste multiplie les stratégies pour simuler la profondeur et mettre l’œil en mouvement. Il marie les fondus enchaînés au spray et les aplats hyper-réguliers de jaune, orange ou rouge taillés au cordeau, fait dialoguer justement les miroirs et les matités. Nul hasard s’il a intitulé son exposition à la galerie Suzanne Tarasiève « Hiatus » : chaque toile joue de l’entrechoc et s’imagine, pour reprendre l’étymologie du terme, en « ouverture béante ». Emmanuelle Lequeux

« Hiatus », de Pierre Schwerzmann. Galerie Suzanne Tarasiève, 7, rue Pastourelle, Paris 3e. Tél. : 01-42-71-76-54. Du mardi au samedi de 11 heures à 19 heures. Jusqu’au 11 mars. suzanne-tarasieve.com