A Bobigny, en marge d’un rassemblement de soutien à Théo L., le 16 février. | PHILIPPE LOPEZ / AFP

Deux semaines après avoir été blessé à l’anus par un policier au cours d’une interpellation en Seine-Saint-Denis, Théo L. a quitté l’hôpital, jeudi 16 février. « Grâce à Dieu, je suis sorti sur mes deux jambes. J’étais rentré en fauteuil roulant, en très mauvais état », a déclaré le jeune homme de 22 ans dans une vidéo postée sur Facebook, remerciant les gens qui l’ont soutenu.

« Je suis très fatigué. La blessure n’est pas encore guérie. (…) Je devais rester encore dix jours mais je n’ai pas pu accepter car je ne sais pas si j’aurais réussi à tenir mentalement », a-t-il expliqué, sa mère et une de ses sœurs à ses côtés.

Théo L. était hospitalisé depuis le 2 février, jour de sa brutale arrestation dans la cité des 3 000 à Aulnay-sous-Bois. Il a déclaré avoir été violé ce jour-là par un membre des forces de l’ordre avec une matraque. Quatre policiers ont été mis en examen, dont un pour viol, dans le cadre de ce dossier.

Un médecin ayant examiné le jeune homme avait diagnostiqué « une plaie longitudinale du canal anal » de 10 centimètres et une « section du muscle sphinctérien ». Il lui avait prescrit 60 jours d’incapacité totale de travail (ITT). Lors d’une visite du président François Hollande, le 7 février, Théo L. avait lancé un appel au calme, demandant aux jeunes de son quartier de ne « pas faire la guerre » et de « rester unis ».

« Moment de tensions »

Si après quelques jours de tensions entre habitants et policiers, l’atmosphère s’est détendue à Aulnay, des violences urbaines se sont enchaînées dans plusieurs communes, essentiellement en banlieue parisienne, poussant l’exécutif à se mobiliser pour éviter un embrasement similaire à celui de 2005.

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François Hollande a modifié son agenda pour se rendre vendredi sur la ZAC (Zone d’aménagement concerté) du Plateau, une zone populaire d’Ivry-sur-Seine, dans le Val-de-Marne. « Dans un moment de tension où la banlieue est sous le feu des projecteurs, il est essentiel que le chef de l’Etat se rende dans les quartiers », a fait valoir son entourage. En déplacement à Strasbourg, le premier ministre Bernard Cazeneuve a rappelé, jeudi, « l’exigence d’exemplarité » qui incombe à « tous les fonctionnaires », notamment les policiers.

Le ministre de l’intérieur Bruno Le Roux s’était rendu dans la matinée à la Direction territoriale de la sécurité de proximité (DTSP) à Bobigny, avant une réunion dans l’après-midi à Beauvau avec les préfets délégués pour l’égalité des chances où il a dit sa volonté de « renforcer les liens de confiance unissant les forces de sécurité et la population ». « On se rapproche aujourd’hui des nuits qui sont à peu près normales » en Seine-Saint-Denis, a estimé le ministre, se félicitant d’un certain recul des violences.

Attaques de la droite

Jeudi après-midi, environ 200 jeunes, qui se sont réunis à Bobigny, ont été dispersés à l’aide de gaz lacrymogènes. Des accrochages épars ont continué par la suite. Treize personnes ont été interpellées, a-t-on appris de source policière. Ce rassemblement s’est tenu devant la gare routière, à proximité du tribunal, à l’endroit où de violents incidents avaient eu lieu samedi lors d’une manifestation de soutien à Théo L..

En pleine campagne présidentielle, la situation dans les banlieues alimente toujours les attaques de la droite. Dans un entretien au Figaro, la présidente Les Républicains de la région Ile-de-France, Valérie Pécresse, a accusé jeudi le gouvernement de « dissimuler la gravité de la situation ». « Il y a un déni de réalité sur l’âge des auteurs de violences », a-t-elle ajouté, en affirmant, dans le sillage du candidat de son parti François Fillon, qu’« il faut mettre fin à l’excuse de minorité qui conduit les mineurs à se considérer comme intouchables ».