infographie : Le Monde

L’enthousiasme pour le financement participatif commencerait-il à s’émousser en France ? Certes, le nombre de sites Internet faisant appel à la « foule » pour financer un projet a explosé au cours de ces dernières années, mais le baromètre 2016 du crowdfunding, réalisé par KPMG pour l’association Financement participatif France (FPF), dresse un bilan contrasté de l’activité de ce jeune secteur.

Le montant des fonds collectés par la soixantaine de plates-formes recensées affiche ainsi une croissance plus mesurée que les années précédentes, selon les données publiées mardi 21 février. En 2016, la collecte a progressé de 40 %, à 234 millions d’euros, alors qu’elle avait plus que doublé un an auparavant. Le ralentissement de la croissance du secteur se retrouve aussi dans les sommes récoltées par les projets proposés sur les plates-formes. Celles-ci sont stables ou orientées à la baisse. En témoignent, par exemple, les prêts participatifs rémunérés, qui sont souscrits le plus souvent par des start-up ou des TPE-PME. Le montant moyen récolté par ce type de dossier s’est ainsi élevé à près de 133 000 euros l’an dernier, contre 224 000 euros en 2015.

Certes, le crowdfunding a continué à gagner en popularité en 2016. Depuis 2010, date de l’émergence de ces sites de financement participatif, 2,5 millions de particuliers ont déjà soutenu un projet, que ce soit sous forme de don, de prêt ou d’investissement au capital. Mais là encore la croissance semble marquer le pas, puisque le même baromètre recensait 2,3 millions de convaincus fin 2015.

Le marché gagne en maturité

Pour les professionnels du secteur, ce ralentissement signifie que le marché gagne déjà en maturité. De manière précoce puisqu’il ne représente encore qu’une goutte d’eau au regard des financements bancaires.

« De nouvelles plates-formes se créent, de nouveaux domaines sont concernés, positive Nicolas Lesur, le président de l’association professionnelle FPF et fondateur de la plate-forme de prêts Unilend. Le secteur a permis de financer plus de 21 000 projets l’an dernier, la dynamique reste forte. »

Si la finance participative permet à des porteurs de projet petits ou grands de se financer en dehors du circuit bancaire classique, elle offre aussi aux particuliers-investisseurs des rendements intéressants. La rentabilité moyenne atteint environ 7 %, selon les chiffres de FPF. Un taux élevé qui s’explique en partie par la jeunesse du secteur, peu de dossiers financés ayant fait faillite. Quant aux projets d’investissement en capital, l’association professionnelle estime que « seulement » 5 % des sociétés financées ont fait défaut.

Soutien du gouvernement

En 2016, le profil des professionnels et des entreprises qui recourent à ce type de financement a légèrement évolué. « Les TPE ont un peu moins de difficulté à financer leurs investissements immatériels auprès des banques. Celles-ci prêtent plus volontiers sans garantie, notamment en raison de la politique monétaire menée par la Banque centrale européenne et du rôle joué par Bpifrance, note Nicolas Lesur. Mais le secteur du prêt participatif trouve par ailleurs de nouveaux besoins à servir, par exemple dans les énergies renouvelables, pour rendre plus acceptable localement un projet d’éolienne, ou auprès du monde médical. Un dentiste qui doit acheter des consommables a davantage intérêt à recourir au crowdfunding qu’à utiliser son découvert bancaire qui lui coûte entre 13 % et 18 %. »

Dans cette nouvelle étape de leur développement, les acteurs de la finance participative peuvent continuer de compter sur le soutien du gouvernement. Après avoir encadré l’activité à la fin de 2014, il a voulu donner un peu plus d’oxygène au secteur en doublant, par exemple, le plafond des prêts que les particuliers peuvent consentir sur ces plates-formes ou en permettant aux investisseurs de souscrire de nouveaux instruments comme les actions de préférence. Ces mesures réglementaires adoptées en octobre 2016 n’ont pas encore produit leurs effets, mais pourraient soutenir la croissance des plates-formes en 2017.