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C’était le dernier tour de la compétition des Initiatives d’excellence (IDEX), qui donne des sueurs froides à la communauté de l’enseignement supérieur depuis près d’une dizaine d’années, au fil des rounds de sélection des champions universitaires français qui auront droit à des millions d’euros. Le premier ministre, Bernard Cazeneuve, a annoncé les résultats vendredi 24 février, suivant le verdict du jury international chargé d’évaluer les candidats de cet appel à projets.

Le dossier porté par le site lyonnais passe enfin la barre, en décrochant l’Initiative d’excellence. Mais le pôle universitaire lillois n’a eu droit, lui, qu’à une labellisation dans une seconde catégorie, destinée aux regroupements de plus petite échelle et en principe moins subventionnée : celle des « I-Sites ». Les explications des décisions du jury doivent être rendues publiques en début de semaine.

Des moyens cruciaux

Lancée sous la droite par Nicolas Sarkozy puis poursuivie par la gauche, l’IDEX vise à faire émerger une dizaine d’universités de recherche pluridisciplinaires de rayonnement mondial, disposant d’une puissance et d’un impact scientifiques de tout premier plan dans de larges champs de la connaissance, avec à la clé des enveloppes d’une vingtaine de millions d’euros par an. Des moyens cruciaux en cette période de restrictions budgétaires, alors que les universités accueillent 30 000 étudiants de plus chaque année.

Une seconde couche a été ajoutée sous la mandature de François Hollande : les « I-Sites », destinés à récompenser des projets d’excellence concentrés sur un nombre de thématiques de recherche plus restreint. Outre Lille, six nouveaux projets ont été labellisés dans cette catégorie vendredi : Pau, Paris-Est, Clermont-Ferrand, Paris-Seine (Cergy), Montpellier et Nantes, tandis que le projet rennais a été écarté.

Cette sélection ultime permet de dessiner la carte de « l’excellence » française soutenue par l’Etat, avec une petite dizaine d’IDEX (Aix-Marseille, Strasbourg, Bordeaux, Sorbonne Universités, Paris Sciences et Lettres, Paris-Saclay, ainsi que Grenoble et Nice ont déjà été sélectionnées), et presque autant d’I-Sites (avec Bourgogne-Franche-Comté et Lorraine, labellisées en 2016). Reste une décision essentielle pour les derniers arrivants au sein de ce club très fermé : les dotations attribuées par l’Etat doivent être annoncées à la mi-mars. Pour les nouvelles IDEX, une enveloppe en capital, dont les universités touchent les intérêts, de deux milliards d’euros est prévue, quand les I-Sites doivent se partager un capital d’un milliard.

Chez les Lyonnais, la satisfaction est grande : le pôle d’envergure n’avait jamais réussi à être véritablement reconnu dans cette compétition, faute de proposer une structuration assez intégrée selon le jury international qui évalue la capacité d’un site unissant de nombreux établissements à ressembler à une véritable université visible à l’international. Le mastodonte de Rhône-Alpes avait tout de même été rattrapé via un soutien financier d’environ dix millions d’euros par an, sur trois années.

Déception à Lille

Du côté lillois, cette requalification dans une catégorie moins prestigieuse et moins dotée n’est pas un lot de consolation, soutient la présidente de l’université Lille 3, Fabienne Blaise, coordinatrice du projet. « Nous partions de rien, on peut difficilement être rétrogradé !, sourit-elle. Nous sortons enfin d’une série noire d’échec, c’est le plus important ». Les projets lillois avaient été recalés à trois reprises auparavant. « Nous allons pouvoir être attractifs et surtout poursuivre la dynamique de développement du site, appelé à compter parmi les 50 meilleures universités européennes », se réjouit-elle.

« Je suis très content pour la région Nord dont les efforts et l’excellence sont désormais reconnus. Ils vont avoir maintenant les moyens de poursuivre », assure Thierry Mandon, secrétaire d’Etat à l’enseignement supérieur, résolument optimiste.

En coulisses cependant, certains confient leur déception. « Si c’est pour récupérer moitié moins d’argent et se retrouver dans la même catégorie que Clermont-Ferrand ou Belfort, c’est tout de même un peu humiliant », pointe un acteur local. « On a raté IDEX, on est en deuxième division et tout le monde est content. Pas moi, le compte n’y est pas, loin s’en faut », déplore le président du conseil départemental du Nord, Jean-René Lecerf, sur Twitter.

La dotation que va obtenir le site lillois sera déterminante pour faire passer la pilule : 15 millions d’euros annuels étaient espérés, conformément aux niveaux des enveloppes décernées dans le cadre des IDEX. « L’Etat nous a dit que le soutien financier sera à la hauteur », indique Fabienne Blaise. Dans un communiqué commun, Martine Aubry, maire de Lille, Damien Castelain, à la tête de la métropole européenne de Lille, et Xavier Bertrand, président des Hauts-de-France, insistent en demandant au gouvernement « une dotation financière exceptionnelle, à la mesure des projets d’ores et déjà engagés, des effectifs étudiants attendus et des ambitions affichées pour l’avenir ».

Un troisième programme

Si la compétition de l’Initiative d’excellence s’achève, de nouvelles voies s’ouvrent en revanche avec un troisième programme d’investissements d’avenir, qui compte des appels à projets en direction des universités, comme les « écoles universitaires de recherche », dotées de 300 millions d’euros. Ce système de mise en concurrence des établissements pour récompenser l’excellence, dénoncé par une partie de la communauté universitaire mais soutenu à gauche comme à droite, a encore de beaux jours devant lui.

La carte de France de « l’excellence » façonnée sous la droite puis la gauche

L’IDEX créée sous la présidence Sarkozy
Lancée en 2009, sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy, la compétition de l’Initiative d’excellence a distingué huit sites universitaires reconnus comme des pôles d’envergure mondiale : Aix-Marseille, Bordeaux, Strasbourg, Sorbonne Paris Cité, Sorbonne universités, Paris-Saclay, Paris Sciences et Lettres et Toulouse. Avec à la clé entre 20 et 30 millions d’euros par an pour chaque université.

Relancée pendant le quinquennat Hollande
Une nouvelle vague de sélections a été relancée après l’arrivée de François Hollande à l’Elysée. Les pôles universitaires de Grenoble et de Nice ont à leur tour été retenus. Vendredi 24 février, la dernière vague de sélections a qualifié Lyon, mais Lille n’a pas passé la barre.

Prochaine mandature
Pendant la prochaine mandature, Toulouse et Sorbonne Paris Cité, qui ont perdu leur financement à l’issue des quatre premières années d’IDEX, espèrent avoir une dernière chance de revenir dans la course. Trois pôles franciliens sont, eux, menacés de sortir du dispositif : Saclay, Sorbonne universités et Paris Sciences et Lettres. Verdict en 2018.