François Pérol, président du directoire de BPCE. | BERTRAND GUAY / AFP

Prémédité ou non, c’est un succès. Mercredi 4 novembre, François Pérol a été renouvelé jusqu’en 2020 à la tête du groupe BPCE, à l’unanimité de son conseil de surveillance. Le président présentera son nouveau directoire le 16 novembre. Cette reconduite anticipée, qu’il avait demandée le 30 septembre, sonne le glas d’un mois de manœuvres discrètes et de grande méfiance parmi les dirigeants régionaux du groupe, qui en sont aussi les actionnaires.

En 2009, la Banque populaire et la Caisse d’épargne sont regroupées sous l’enseigne commune BPCE, dont elles détiennent 100 % des parts. A la demande de Nicolas Sarkozy, François Pérol, alors secrétaire général adjoint de l’Elysée, prend la direction du groupe nouvellement créé. A ce titre, il est poursuivi, en 2013, pour « prise illégale d’intérêts ».

Le 24 septembre 2015, il est relaxé, mais le parquet financier fait immédiatement appel, faisant peser sur François Pérol une nouvelle échéance judiciaire, en 2017 — année de fin de son mandat actuel. Et, le comble, année de l’élection présidentielle. Une inquiétude de plus pour le banquier, dans un groupe historiquement proche du monde politique.

Boîte de Pandore

On comprend donc la volonté du président de s’assurer une marge de manœuvre plus confortable pour lancer un nouveau plan stratégique. D’autant que les méthodes de François Pérol peuvent faire grincer des dents dans un groupe mutualiste où la coopération est reine. Entre les dix-huit Banques populaires et les dix-sept Caisses d’épargne régionales, chacune dotée d’un dirigeant exécutif et d’un président non exécutif, ce sont plus de soixante-dix dirigeants régionaux qui ont leur mot à dire. Or, certains ont été irrités qu’il les mette ainsi au pied du mur. Par ailleurs, il aurait plusieurs fois laissé entendre, à demi-mot, sa volonté de centralisation et ses réserves sur le modèle mutualiste.

Là-dessus, le procès de François Pérol est venu ouvrir une boîte de Pandore en interne. Les dirigeants régionaux ont préparé sa succession dans le cas où il aurait été déclaré coupable. De quoi réveiller des ambitions. « Guerre des chefs », « guéguerre des ambitions personnelles », dénoncent les syndicats, qui insistent sur le fait que François Pérol a à son actif un impeccable bilan économique et financier. La pérennité de François Pérol à la tête de BPCE permet aussi à certains dirigeants régionaux « de tirer des avantages pour leur carrière personnelle », souligne l’un d’entre eux.

Pour obtenir la confiance des membres du conseil de surveillance, M. Pérol aurait fait valoir que son renouvellement serait un gage de stabilité. « S’il y a déstabilisation, elle provient de lui », réplique un dirigeant régional. « Il n’y avait aucun caractère d’urgence, [sa demande] rajoute une perturbation inutile ». Stratégie assumée ou coïncidence, elle semble idéale : si ses détracteurs s’activaient, ils lui donnaient raison sur l’instabilité du groupe, sinon, ils lui laissaient le champ libre.