Série documentaire sur Arte à 17 h 45

Jardins d'ici et d'ailleurs - ARTE
Durée : 25:51

La série Jardins d’ici et d’ailleurs est l’une des meilleures programmations d’Arte et l’on se réjouit de voir revenir à son antenne les épisodes de la saison 1 et, du 20 mars au 14 avril, une saison 2 qui verra chaque épisode nouveau, diffusé à 18 h 30, précédé de deux numéros issus de la saison 1. On y partira plus loin encore que l’an passé, jusqu’au Japon et en Indonésie.

En attendant le 20 mars, la chaîne franco-allemande a, depuis lundi 28 février, inscrit à son programme en semaine, à 17 h 45, cette première saison, menée comme la suivante par l’architecte paysagiste Jean-Philippe Teyssier.

On avait en grande partie regardé ces passionnants reportages de 26 minutes, mais certains avaient échappé à notre vigilance, comme celui qui s’immerge dans le vaste jardin de Quinta (« domaine ») da Regaleira, au Portugal.

Cet ensemble architectural situé dans le centre historique de Sintra, ville classée au Patrimoine mondial de l’Unesco, était le lieu de villégiature fréquenté par l’élite lisboète en quête de fraîcheur pendant les chauds étés. Situé à quelque 40 kilomètres de Lisbonne, ce jardin existait depuis le XVIe siècle et se distinguait par ses cultures de plantes exotiques. Passé dans les mains de divers propriétaires, il fut acquis, en 1892, par l’excentrique António Augusto Carvalho Monteiro (1848-1920), qui avait fait fortune dans le commerce de café au Brésil, où il était né de parents portugais.

Un puits dit « initiatique »

Entre 1904 et 1910, « Monteiro le millionnaire », comme on le surnomme, fait aménager ce parc et ordonne de nombreuses constructions qui, dans le goût du temps, s’inspirent de diverses époques anciennes – Antiquité, Moyen Age et Renaissance essentiellement – et empruntent leurs ornements à des diverses symboliques, dont celle de la franc-maçonnerie.

Ce « système de collages reliés par des cheminements irréguliers », ainsi que le dit Jean-Philippe Teyssier de la structure du parc, a été conçu par un architecte paysagiste italien, Luigi Manini (1848-1936), qui était également scénographe à la Scala de Milan.

Le parcours arboré mène du palais à une chapelle, de serres chaudes à des tourelles, et contourne sources, lacs ou puits, le tout entouré d’un mur d’enceinte. Et il peut être considéré comme un parcours initiatique – récurrence des grands jardins depuis le Moyen Age avec, en particulier, la figure du labyrinthe, comme celui du jardin de Valsanzibio (Italie), décrit dans l’épisode diffusé lundi 27 février.

Au cœur des collines au sud de Padoue et à 50 kilomètres de Venise, le domaine de Valsanzibio s’étend sur 8 hectares. Ce jardin est l’œuvre de la famille Barbarigo, riches marchands vénitiens du 17ème siècle. Il aurait été construit en signe de reconnaissance à Dieu pour avoir épargné la famille de la peste en 1631. | © Bo Travail

Au domaine de Regaleira, le labyrinthe est vertical : il s’agit d’un puits dit « initiatique », qui représente, selon qu’on le parcourt de manière ascendante ou descendante, la montée au ciel ou la descente aux enfers. Ses 139 marches franchissent neuf niveaux, « les neuf cercles de l’enfer, neuf sections du purgatoire et les neuf ciels du paradis. »

Ce jardin, qui est « un compromis entre l’opéra et le cinéma », ainsi que le dit assez justement un représentant de la ville de Sintra, aujourd’hui responsable de la préservation du site, a tout l’air d’un « bric-à-brac d’identifications multiples », pour reprendre l’expression psychanalytique.

Car il y a du rêve, du cauchemar, du toc et du sublime dans ce fatras assez fascinant où l’on imaginerait volontiers qu’un remake de La Belle et la Bête, de Jean Cocteau, ou une nouvelle mouture d’un Dracula puissent y être tournés.

Jardins d’ici et d’ailleurs, de Jean-Philippe Teyssier, réalisé par Jean-Michel Vennemani (France, 2015, 20 × 26 min).